❝ all i want for christmas is you; Alice

Elle semble naturelle, enfin. C’est tout ce que tu attendais derrière cet acte plus qu’intéressé et maîtrisé. Parce que tu étais comme ça Cassidy. Sincère oui, mais d’un autre côté tu avais ce besoin de contrôler les choses. Triste héritage d’une famille et d’un père à qui rien n’échappe. Élevé dans le pouvoir et la possession, quelques tares demeuraient enfoui dans ton inconscient.

L’expression de ton visage est toujours dans la retenu, habituellement. C’était une des rares fois ou tu te laissas aller. Un sourire désormais amusé rayonnait sur ton visage. A travers les traits si étriqués de ton visage s’échappait comme de… la vulnérabilité.
Heureusement, tu étais trop plongé dans ce moment d’insouciance pour t’en rendre compte. Tu ne fixais que ses lèvres, fines, purpurines, délicates et à la fois indomptables. Quelque chose t’envoûtait, sans que tu puisses expliquer ni définir précisément quoi.

Alors que tu joues naïvement avec elle, comme un lionceau faisant peur à une petite gazelle, lui donnant des coups de griffes sans savoir qu’il est destiné à la dévorer. Et pourtant c’est écrit.. c’est ainsi, l’ordre naturel de la vie, du pouvoir.
Elle s’approche de toi, à nouveau. Provocation, damnation, ton corps entier se cripse dans la retenu.

— “Je veux te dévorer, arrête.” Tu préviens, tu menaces. Tes poils se hérissent le long de ton échine dans une chair de poule.
Mais elle continue, sûre d’elle. Affranchie. Elle casse les liens invisibles qui la retenaient loin de toi. Tu le sais. ça provoque maintenant puis ça va pleurer ensuite. En quête de liberté, l’oiseau tente de s’envoler et tombe du nid après quelques envolées. Mais que se passe t-il quand celui-ci est à terre ? Sans repères. Les prédateurs rôdent dans la forêt. Et malheureusement tu en fais parti, Cassidy.

— “Hmm.” Une onomatopée. Tu ne sais que dire, elle est si prêt. Elle te tente, vile diablesse. Mais si tu craques, elle ne te donnera plus raison. Si tu craques, c’est le débordement. Si tu craques, le juge prononcera sa sentence. Tu joues avec moi, Cassidy.
Du jus à la fraise s’écoule de ses lèvres, tu fermes les yeux, définitivement pris dans le filet. Tu approches plus son visage et plaque ta bouche à la sienne, sans préavis.

Tu recules, comme désarmé. Face au fait accomplis, tu détournes un regard frustré et énervé. Mais énervé contre toi même.
— “Je ne sais pas si c’est une bonne idée.” Tu ne veux pas la blesser, mais tu sens que quelque chose ne va pas. Comme si vous étiez à ce moment là dans deux mondes opposés, vous partagez la même maison mais pas la même famille, vous partagez les mêmes valeurs, mais pas au même destin.

— “Je suis condamné à devenir un homme que tu détestes.” Ton regard s'efface face à l’interface fascinante du cosmos : tout est vide.

Que se passait-il ? Pourquoi donc ta respiration se perdait-elle autant ? Pourquoi ton regard fuyait indubitablement le sien ? La vérité est toujours plus dure à entendre. L’inévitable est toujours plus dure à accepter. Alors que tu allais partir sans rien ajouter, fuir comme tu sais si bien le faire quand la situation t'embarrasse, elle te retient à coup de mots. De mots justes mais à la fois tellement naÏfs. Elle te parle d’univers.. de lui.

— “Tu ne connais pas les Hingsleys, tu ne le connais pas.” Tu te retournes pour l’affronter, le regard hautain comme seule armure.
— “Tu ne me connais pas, arrête de parler comme si nous étions mariés.”

Cette fois, c’est toi qui te braque. Tu sais pertinemment que tu ne gagneras pas à ce petit jeu là. C’est trop pour toi, c’est trop pour ton âme et pour ta voix. Alors que la voix d’Alice se brise, elle te demande, presque implorante si tu comptes t’éloigner, ce à quoi tu répond froidement.

— “Je n’ai pas dit ça.”
A cette réponse, auquel tu t’attendais et tu espérais qu’elle s’enfuit en courant, elle t’attrape le visage, la mine sévère. Elle te juge, à travers ses prunelles brillantes de détermination. Comment ça, elle n’allait pas te laisser faire ?
Evidemment, son petit manège était efficace, car il t’en fallut peu pour briser ta carapace. Elle avait ce don agaçant d’être particulièrement intrusive.

— “Tu m’insupportes, à chouiner et couiner comme une enfant, j’ai du mal à te résister longtemps.” l’espace d’un sourire rapide et ta mine redevient soudain moins expressive. Elle ne comprenait pas. Elle ne voulait pas comprendre qu’elle allait souffrir. Souffrir jusqu’à en mourir.

Elle ne cesse de te parler de lui, de son travail, que tu auras beau reprendre les rennes, qu’elle l’accepterait, qu’elle ne te jugerait pas, jamais. Tu sais que cela est utopique, et une boule se resserre au niveau de ton estomac à l’annonce de la sentence. Tu ne voulais pas être un Hinglsey. Du moins, tu es fier de ton nom mais pas de tout ce que cela représente. Vous savez, dans l’envers du décor ? Car même les maisons les plus prestigieuses cachent des secrets, dissimulent des scandales.

— “Laisse tomber Alice. Tu vas faire quoi ? Dis-moi, qu’est-ce que tu comptes faire ?” Tu la foudroies du regard.
— “Tu ne comprends juste pas. Je voulais seulement te prévenir.”
Tu tournes les talons, lui laissant le paquet de fraises coulantes entre les mains. Dopey, ton lutin de Cornouaille domestique se réveilla à ce moment là, s’extirpant de ta poche pour grimper sur ton épaule et tira la langue à Alice alors que tu quittais les douches.

Cela devient aussi dramatique qu’une série télévisée. Tu as le coeur en miette, car tu sais que tu devras briser le sien une fois pour ne pas le détruire à jamais. Ce n’est rien, c’est le début, ça fait moins mal que si vous commencez quelque chose. et que tout s’arrête.

Tu coupes les mauvaises racines maintenant, avant qu’elles ne s’accrochent à ses chevilles, l’embrassant totalement comme un filet du diable dont elle ne pourrait s’échapper. Car oui, si elle sort avec toi, elle ne connaitra plus la lumière, mais seulement l’ombre, l’ombre de la famille Hingsley.

— “Tu crois que c’est aussi simple, que tu as juste à dire que tout ira bien, que tu es capable de tout endurer...” Tu te retournes violemment pour saisir son visage fermement.
— “Je croyais être capable de tout endurer ! ça ne change rien au résultat, on a beau se battre, ce qui doit arriver arrive et nous rattrape à la réalité.”

Tu finis par la lâcher et ouvre violemment la porte qui s’était refermé.
— “Je vais rejoindre les autres à la grande salle. J’ai la dalle.”
C’est un mensonge, ton estomac est tellement comprimé que tu as envie de gerber.

— “Tu peux me suivre, ou rester-ici, je m’en fiche. A plus tard.”
Cette fois, elle ne te retiendra plus dans cette pièce.