PAZ/IT.

XX.
britannique
sang mêlé
cinquième année
house
ssaf, vol sur balai appliqué

Les poignets sont rouges et les paumes ensanglantées, la peau abîmée d’avoir été trop nettoyée. Pazit a frotté tant de fois, tant de fois, comme pour les effacer. Elle a en elle une sensation terrible : celle que ses mains soient constamment sales, putrides. Comme si un virus s’était collé à sa paume, s’était incrusté dans ses pores. Ca a gagné ses cellules et comme une maladie, ça s’est propagé, ça a gagné ses veines et a contaminé son sang. Sous sa peau, ça bat, ça vit, ça survit. Rien n’arriverait à l’annihiler.
Ca a putréfié sa personne, pourrit ses membres et arrêté son coeur. Ca bloque sa respiration parfois, fait déconner les neurones.
En vérité, c’était là depuis le début : ça dormait, attendant avec impatience le jour de sa naissance. Comme un foetus démoniaque, ça grandissait en silence dans son ventre. C'était un secret enfoui en elle et dont elle n'en connaissait même pas l’existence.
Et comme tout mauvais diagnostic découvert, ça a bouleversé sa vie.

Comme la lave incandescente d'un volcan, c’est descendu jusqu’au bout de ses doigts, brûlant tout sur son passage, asphyxiant les poumons, consumant l'oxygène : et ses mains sont devenues constamment sales. Ces mêmes mains qu'elle a tant de fois tendues, grandes ouvertes, pour se refermer sur du vide. Sur des chimères. Sur des fantasmes. Sur une fumée épaisse qu’elle rêvait de pouvoir attraper.
Il n'y a que les idiots pour croire à l'impossible, et elle ne l'avouera pas, mais elle fut idiote.

Alors Pazit est malade. Malade d’être inhumaine. Malade d’être spéciale. Elle voulait être banale. En vérité, elle en est même arrivée à souhaiter ne plus exister.

Être impalpable.

C’était avant qu’elle ne se réveille d’un long, très long songe. Que la vie s’impose à elle, que cet onirisme s’évanouisse.


Désormais, Pazit court partout elle crie partout elle est fatigante, éreintante. Comme si elle cherchait à s’épuiser tout le temps : Pazit se tue à se vider de toutes ses forces. Pazit s’évertue à ce qu’on la voit constamment, peut-être pour qu’on arrête d’y faire attention, car Pazit a autrefois rêvé d’être transparente. Elle fait du bruit comme si elle craignait le silence, elle frappe comme si elle avait peur d'oublier ce que ça fait, de sentir quelque chose. Pazit boit et mange comme si elle allait mourir demain.
Pazit est reine de l'excessif.
Pazit elle crève d’amour, elle crève de contact. Elle veut qu’on la touche, qu’on lui fasse voir qu’elle est là, qu'on la rassure en lui disant je te vois.
Elle dévore tout ce qui bouge, ses lèvres affamées jamais rassasiées. Elle attrape des mains, des gestes, et elle les attire tout contre elle. Tout ce qui gravite autour d’elle doit lui appartenir. Ca doit fusionner avec elle.
Parce qu’elle a l’impression d’être vide : et être vide, c’est flotter dans l’air. C’est décoller de la terre. Alors elle veut se remplir de tout, de rien, mais de quelque chose qui pèse assez pour rattacher ses pieds bien au sol.

Pazit elle meurt de découvrir un semblant d’odeur qui aurait pu être la sienne. Elle ne craint ni le danger, ni la mort — elle les a côtoyé pendant trop longtemps pour en être effrayée.
Elle sauterait d'un balai pour connaître le vertige. Elle se lesterait au fond d'un lac pour savourer la panique. Elle titillerait un feu dévastateur pour se confronter à la chaleur.
Pazit semble être fascinée par la vie, alors qu'en vérité, elle l'insulte.

Pazit cherche le vrai, l’implacable. Elle aime ce qui existe. La fumée des balivernes, les effluves des rumeurs, ce ne sont que des cendres qui s'envolent dans une tempête d'irréel.

Pazit veut la vérité.

Et pour elle, la magie ? ça n’existe pas.
C'est le feu même du mensonge.

les secrets c’est terrible
ça bouffe les entrailles et ça crève la panse : ça défonce les intestins et triture le crâne, ça frappe le coeur et déchire la gorge.
parce que ça veut sortir, ça veut sortir, ça veut vivre.

un secret c’est une vérité qu’on empêche de faire naître : il est couvé trop longtemps et devient malheureux — à force de demeurer dans les ténèbres, il devient ténèbres
il devient sombre et froid et glaçant
alors qu'il était bon autrefois, chaleureux, parce qu’elle s’en occupait avec amour et attention.

il était dans ses bras et elle l’enlaçait sans le moindre malaise : elle l’aimait comme son enfant, comme un bâtard dont on ne connaît ni le père ni la mère.
un bâtard qui n’a pas sa place dans ce monde.

alors il l’a fait dans une cave : sombre, froide, glaçante, avec un ciel étoilé retranscrivant toutes les étoiles de la galaxie.
une cave secrète elle aussi.
Pazit l’a rencontré alors qu’elle ne connaissait pas le secret — franchise incarnée.

il lui a dit viens, viens.
elle a dit je viens, je viens — et elle a rencontré son être transparent, ses traits blancs comme le marbre, ses yeux froids comme la glace.
mais quelque chose subsistait en lui ; une chaleur vivante, brûlante.

il la faisait rire et elle le faisait rire.
c’était terrible comme secret
devoir s’esclaffer doucement, sans arrêter d’être muet.
c’était terrible comme secret
devoir s’aimer sans pouvoir se toucher.
et il tendait sa main vers sa joue pour pouvoir la caresser et elle ne ressentait rien qu’une brise glaciale.
il n’y avait que sa voix pour la réchauffer;
elle n'avait que ses yeux pour pleurer, parce que lui, ne le pouvait pas. il restait planté devant elle, flottant à quelques centimètres du sol, le teint blême et le regard compatissant.

il lui disait si je pouvais je le ferais.
il lui disait je suis mort, mais je me suis souviens de ce que ça fait.
alors elle répondait, je suis vivante mais si je pouvais je me tuerai.

parce que les secrets ça rend fou, ça rend dingue — ça bouffe les entrailles et ça tue l'espoir.
elle aurait juste souhaité le toucher, une fois, le sentir, une fois, l'enlacer, une fois. parce que c'était des baisers légers, inexistants.
froids.
frigides.
mais pazit elle était prête à devenir folle, pazit elle était prête à s'arrêter de vivre et de devenir un secret elle aussi, dans une cave avec lui, pour l'éternité.
pazit elle était déjà folle de lui, alors elle pouvait l'être avec lui.

alors il lui a hurlé de s'enfuir.
de partir, d'arrêter de souffrir : il a tellement hurlé qu'on les a entendu. et de vrais bras l'ont arraché à lui.
de vrais bras l'ont écarté de lui, de vrais bras l'ont enlacé pour lui dire d'arrêter de souffrir aussi, de vivre.
pazit ne voulait pas vivre sans son meilleur ami flottant, presque imaginaire. mais il a rejoint ces bras là, ces bras palpables et il lui a dit
pars, pars.
et elle a dit, je pars, je pars, le secret trouvé, le coeur brisé.

depuis elle songe, la magie est un mensonge
elle chante l'omnipotence et débouche sur de l'impuissance — rien ne lui rendrait son secret.
la magie est un mensonge alors comme une insurgé elle hurle la vérité : sa vraie magie elle réside dans ses cordes vocales, dans le bruit. la mort, elle ne veut pas non plus en parler, la vie elle ne veut plus l'inventer. elle veut la frapper, la tester, la fatiguer.
elle veut prendre à la vie tout ce que la mort lui a interdit.

slt
j'ai moins de classe que pazit
mais j'ai les même oreilles
et le même zéro instinct de survie
dans ma vie j'ai rien fait
sauf une fois j'ai incarné un lapin
du coup jpense qu'on peut dire que jsuis comédienne