La journée avait été longue. En fait cela faisait un moment qu’elles l’étaient devenues. Entre les cours, mes obligations de préfets et devoir éviter Kieran Nails, ça commençait à devenir fatiguant. En ce qui concernait le griffon, je n’avais toujours pas digéré sa petite folie de la dernière fois. Je savais que je ne pouvais n’en vouloir qu’à moi- même pour m’être laissé embarqué dans cette histoire, mais quelque part je lui en voulais à lui aussi. Et surtout, ce qui était particulièrement laissant c’est que cela avait fortement affecté ma réputation. Mais une fois de plus, c’était ma faute, j’aurai dû être plus malin.
Donc, depuis quelques jours, je lui réservais un traitement particulier. Pas hostile juste froid. Et quand le voyais sa tignasse rousse et que j’avais le temps, je faisais demi-tour pour l’éviter. Je ne pouvais pas m’empêcher de ressentir cette tension, cette nervosité dans ma poitrine. Je savais que le mieux à faire c’était encore d’en parler, de m’énerver un bon coup. Mais je ne pouvais pas. Pour plusieurs raisons. Alors j’attendais que ça passe.
Je rentrais dans la salle commune après le repas du soir, pensant enfin pouvoir me reposer. Sauf que non. Une discussion des élèves de quatrième année me rappela que j’avais un devoir d’astronomie à rendre pour après-demain. Je l’avais complètement oublié. Il faut dire. j’avais trop de choses dont je devais me rappeler en ce moment et l’astronomie...comment dire, c’était le cadet de mes soucis, et certainement pas la matière la plus importante de mon cursus. Je poussais un long soupir. Bon allez, Rief. Courage. On se lève, on se bouge les fesses. Profite en pour faire une petite ronde et puis file directement à la tour. J’emportais donc avec moi de quoi relever les coordonnées et un petit téléscope portable dont j’avais fait l’acquisition il y a quelques années. Pas besoin de devoir forcément passer par la tour, qui était souvent occupée. Et ce soir, elle l’était. Alors que je montais les escaliers j’entendais des voix s’élever. Des pleurs, des éclats de voix. A première vue et sans vraiment m’y intéresser j’imaginais qu’il s’agissait d’une espèce de rupture de couple. Je poussais un soupir. Non, je n’avais pas envie de débarquer là dedans en mode “ salut, je viens juste faire mon devoir et ensuite je m’en vais. Mais faîtes comme si j’étais pas là”. En râlant intérieurement je faisais donc demi-tour. Les couples, je vous jure... Je pouvais toujours passer au 7ème étage. Après tout les Gryffondors n’avaient pas encore élu de préfet et si ça continuait, cet étage finirait par devenir une zone de non-droit. Et puis de là, je trouverai un endroit d’où observer le ciel.
Heureusement, l’étage n’était pas en si mauvais état que ça. Personne ne semblait s’intéresser aux archives pour le moment et c’était plutôt calme. Je passais devant le portrait de la Grosse Dame qui me demandait si j’étais perdu. Je la rassurais en lui disant que je savais très bien où j’allais et que je ne faisais que passer. Alors je me rendais aux balcons. A cette heure-ci ils étaient plutôt déserts, les élèves privilégiaient souvent les endroits où la luminosité était optimale. Je m’approchais du muret et je touchais la pierre de ma main. Fraîche. Je levais alors les yeux vers la voûte céleste. C’était parfait. Très peu nuageux. Et même si je n’avais pas une vision à 360 degrés, cela suffirait pour au moins commencer - je pourrais terminer demain ou tout à l’heure, quand les deux tourtereaux auront fini de piailler.
Je déballais donc mon téléscope portable, et je l’orientais vers le bon endroit. En quoi l’astronomie avait un rôle important à jouer dans la médicomagie, je n’en avais pas la moindre idée. A part un remède ou deux qui utilisaient des ingrédients qui se récoltaient lors de certaines phases de la lune mais soit...Ce n’était pas si important que ça. J’ôtais alors mes lunettes afin de pouvoir regarder attentivement dans la lunette et chercher attentivement les constellations du zodiaque.
Ça faisait déjà quelques jours que la nouvelle était tombé. 'Pa en avait officiellement raz le kilt de nos conneries. Pourtant il était tolérant et patient, je crois même que c'est l'homme le plus compréhensif du monde quand on parle de faire des conneries. Mais là, je crois qu'on avait atteint un degrés un peu trop épique pour qu'il laisse passer ça. Alors il était venu jusqu'à prés au Lard, rien que ça ça lui avait sacrément cassé les pieds, je crois que c'est la première fois qu'Aili et moi on le voyait vraiment en colère. Il nous avait sorti un paquet de lettre que le directeur et autres profs lui avaient envoyé. Y'en avait beaucoup.. vraiment beaucoup. En faite je pensais pas qu'on prenait la peine de vraiment lui écrire à chaque fois. Bon, les grosses boulettes, ouais ça semblait logique... mais tout? Je me suis senti complètement honteux, en faite c'est la première fois qu'Aili et moi étions si silencieux, elle non plus ne faisait pas la fière même si elle avait gardé son air nonchalant, comme si ça l’intéressait pas, je savais que c'était loin d'être le cas.
La beuglante passé on était rentré au château sans vraiment faire les malins. Bien entendu il nous avait privé d'à peut prêt tout ce qu'on pouvait lui demander jusqu'au vacances. Plus d'argent, plus de service, plus rien et il avait même annulé notre voyage annuel. Ça c'était la preuve qu'il était vraiment sur les nefs. J'arrivais pas à m'enlever de la tête la culpabilité qui s'y était logé. Ça et la tristesse que la déception dans son regard avait bombardé en première ligne. Peut être que j'aurais due m'excuser ou faire quelque chose, mais les excuse dans ce genre de cas ne faisaient qu’attiser un peu plus la colère et le reste. Ça servait à rien d'être désolé, c'était juste trop tard. Maintenant fallait juste que je me rachète et que je me fasse pardonner.
Les jours suivant n'avaient rien de différent si ce n'est que j'essayai de me forger un masque souriant le temps que les émotions retombent et que tout redevienne comme avant. Je crois que ça allait prendre un sacré bout de temps mais j'avais aucune envie qu'on commence à me tourner autour parce que je tire la gueule ou que je reste dans mon coin en espérant très fort disparaître. C'est beaucoup trop gênant à raconter et de toute façon ça regarde personne, surtout que la moité d’entre elles seraient capable de me glisser que je l'avais cherché. Je préférais ne pas en parler de toute manière, j'aime pas avoir l'air de me plaindre, ou du moins de vraiment me plaindre. Aili ,elle, gérait comme elle pouvait, elle avait simplement l'air de tirer un peu plus la gueule que d'hab, dans le fond ça changeait pas trop. On était bon à ça, la comédie, ce voiler la face et fuir sans rien dire. C'était chiant mais c'était comme ça.
J'en dormais plus, même si 'Pa avait arrêté de m'approvisionner en sucreries diverses, j'arrivais pas pour autant à trouver le sommeil. C'était même pire qu'avant. Je fermais les yeux et je repensais aux choix que j'avais fais et je cherchais à comprendre pourquoi ça finit toujours comme ça. Peut être que c'était moi le problème, qu'est ce qu'allait pas chez moi ? Je finissais toujours par mettre les gens à bout même quand je pensais bien faire. Ils sont excédés et ils finissent par partir ou par m'éviter. Je voulais tellement les retenir qu'au final ça les faisait tous fuir. J'aimais pas en revenir à cette conclusion. Fallait que je marche, marcher ça fait du bien et je voulais aussi oublié que j'avais finit mon dernier paquet de chewing-gum... Les tonnes de lettres et d'excuse envoyé ces derniers jours n'avaient rien changé, en faite j'avais même pas eu de réponses ça me laissais une sensation de déjà vus un peu angoissante. Mais il faut du temps c'est tout. Juste du temps.
Je sortais de la salle commune en traînant mon sac avec moi, il me quittait encore moins depuis ce jour là, je dormais quasiment avec en réalité. C'est idiot mais ça me réconfortait de l'avoir pret de moi. Puis comme ça ça me donnais l'impression d'aller bosser même si ça ne bernait pas grand monde au final. J'avais pas de kigurumi cette fois, simplement un débardeur un peu trop banal et un survêtement qui commençait à ce faire vieux j'avais mis ça sans réfléchir, et c'était aussi une façon de me persuadé de resté au lit... mais ça n'avait pas tellement marché. Au final je me retrouvais à vagabonder dans le couloir en cherchant quoi faire, ou aller. La salle des moldu peut être ? Quoi que j'avais pas tellement envie de croiser quelqu'un et si je comptais y rester plus que tard les préfets passaient leurs vie à chasser les fraudeur dans ce coin. Dehors c'était bien, mais c'était loin. Alors je me contente de marcher en chantonnant « I will folow you » pour moi même à défaut d'avoir de la musique dans les oreilles. La première fois que je l'avais entendu je m'étais dis qu'elle était jolie et j'adorerais qu'on me la chante un jour, alors je me la chante à moi même parce que ça me fais sourire d'y repenser.
Mes yeux ce perdent au hasard du couloir jusqu'à croiser un visage familier. Ou plutôt des cheveux.Ils étaient bleu et ils me tournaient le dos. Rief était sur le balcon à regarder les étoiles, je trouvais ça bizarre étant donné qu'il y avait milles endroit plus approprié pour ça mais j'étais content de le voir. Je crois qu'il m'évite un peu depuis quelques temps, ou alors c'est moi qui vais moins vers lui ? J'étais pas certain, mais c'était l'occasion de le savoir. Mes pieds m'avaient mené jusque dans sn dos, à quelques mètres de lui. J'étirais un sourire sur mes lèvres avant de sortir ma baguette ainsi qu'une figurine de Dalek miniature qui faisait office de porte clef normalement. D'un coup d baguette je fis léviter la figurine jusque devant le télescope et criant dans son dos
« AAAAH les extra terrestres nous attaquent !! »
J'en riais tout seul, content de lui avoir fait peur ou juste d'être encore capable de faire ce genre de débilité avec les gens. Mais que ceux qui risquent pas de ce vexer ou de m'en vouloir, ce qui était le cas de Rief, même si j'imagine qu'il allait me faire ses gros yeux derrière ses lunettes. Je lui offre quand même un sourire pour être certain qu'il comprenne que je ne me moquais pas.
A travers l’objectif, ces étoiles si lointaines, d’ordinaire inatteignables devenaient à ma portée. La partie purement raisonnable en moi me rappelait qu’il ne s’agissait que d’astres, de boules d’énergie en fusion dont je devais noter les mouvements et les coordonnées. Pour un devoir. Quelque chose qui était censé m’apprendre quelque chose et être pénible en même temps. Et puis il y avait l’autre partie, le rêveur qui s’émerveillait de ces lueurs nocturnes, de ces lucioles millénaires. Elles avaient rassuré les humains dans leurs périodes sombres mais avaient aussi suscité leur curiosité. Ces millions d’étoiles, pendues dans le ciel, signifiaient-elles,... un autre million de mondes, un autre millions de regards dont certains se tournent vers moi ? Peut-être que nos regards se croisaient à travers les galaxies, les années lumières, sans que je le sache ? Mais ici les gens regardent peu vers les étoiles. Ils regardent leurs chaussures, leurs livres, leur reflet. Regarder vers les étoiles, c’est tendre une main vers l’inconnu. Et ici tout le monde préfère garder ses mains dans ses poches ou dans ses manches. Il auraient bien besoin de s’allonger et de regarder le ciel dans les yeux. Se perdre dans cette sensation de vertige qui les envelopperait et les rappeler qu’ils sont insignifiants.
Perdu dans mes pensées, je retrouvais une sorte de sérénité. Rien de tel que l’univers pour vous rappeler votre place dans ce monde. Et puis, brutalement, quelque chose de flou et de vaguement marron devant l’objectif. Mais ce n’était pas ce qui m’avait fait sursauter. Non. C’était la voix ou plutôt le cri. J’avais brutalement sursauté, par réflexe, ce qui avait résulté en un mouvement brusque du téléscope contre mon oeil.
«AÏE !!»
En me frottant l’oeil droit, je me redressais et je me retournais pour découvrir le coupable. Il était assez proche et assez reconnaissable pour que je le distingue sans mes précieuses lunettes. Tignasse rousse, sourire moqueur et satisfait. Kieran Nails dans toute sa splendeur. Et c’est marrant d’un seul coup, ce sentiment de sérénité de tout à l’heure. Envolé. Là j’étais juste franchement contrarié, énervé presque.. Et j’avais mal à l’oeil. La brutalité du changement, ce roller coaster émotionnel me fit dire des choses que j’aurai probablement formulé autrement dans mon état normal :
« Mais putain, Kieran ! Tu cherches à me faire avoir une crise cardiaque ?! Aah...»
Lui ça l’avait fait rire. Quel gamin ! Je m’étais vraiment fait mal en plus. Bon. La douleur commençait déjà à s’atténuer, ce n’était pas grave. Mais franchement, je devrais pouvoir faire mon devoir d’astronomie sans craindre d’être pris en embuscade par un Gryffondor un peu collant. Est-ce qu’il m’avait suivi jusqu’ici ? Peut-être. Je ne sais pas. En plus à quoi ça servait de m’aborder ici comme ça ? Il n’y avait personne pour le voir m’embêter. Pas de public à par le rouquin. Il faut croire que ça suffisait à le satisfaire. Je gardais mon oeil gauche clôt pour l’instant, remettant mes lunettes sur mon nez mais passant de temps en temps mes doigts sous les verres pour le frotter.
« Qu’est ce que tu fais ici de toute façon? »
J’imagine que je devais paraître un peu défensif. Mais après m’être fait agressé, je pouvais difficilement faire mieux.
Bon peut être que j'y était allez un peu fort c'est vrais. Le pauvre avait même pas eu le temps de relever le nez de son bidule, en faite il ce l'était pris en plein œil sous le coup de la surprise. Oups ? Je pouvais pas savoir qu'il allait ce faire mal même si c'était souvent ce qui arrive dans ce genre de cas. Je le regardais avec mon demis sourire, esquissant un « désolé » qui fut vite recouvert par ses complaintes. Est ce qu'il venait de dire un gros mot là ? Je savais même pas qu'il en était capable, s'il avait pas eu l'air si énervé je crois que j'en aurait rigolé. Mais il allait ce vexer alors.. et puis il avait toujours ce regard un peu froid et je crois que c'était pas uniquement parce que je venais de manquer de l'éborgner avec son télescope alors je garde ce sourire en récupérant ma figurine.
Le préfet avait l'air un peu contrarié. Peut être que c'était pas une si bonne idée de venir le déranger. Mais j'aimais pas marcher tout seul et puis il était là sur mon chemin alors c'était idiot de pas venir le voir. J'aurais pas due commencer comme ça c'est certain. Il resta un moment planté là à ce masser l’œil, visiblement il s'était pas raté, et comme c'était en parti ma faute je me sentais quand même un peu coupable. Mon corps fit naturellement quelques pas dans sa direction simplement pour m'assurer que tout allait bien. Son oeil avait pas grand chose sauf qu'il le gardait fermé avant de remettre ses lunettes à leurs place. C'était pas si grave alors. Il a pas besoin de ce fâcher autant.
Vient ensuite le sujet fâcheux du « qu'est ce que tu fais ici ? ». Au moins il m'avait pas sorti son regard de préfet même si curieusement je le préférais à celui qu'il me faisait en ce moment. Il est toujours fâché. Je crois qu'il avait même pas besoin de le dire, ça ce voyais dans ses yeux, mais je gardais ce sourire, espérant qu'il finisse par ce détendre comme à chaque fois que je traîne dans ses pattes, à force il devait avoir l'habitude.
« Bah j'arrive pas à dormir.. Alors je suis venu marcher puis comme je t'ai vus bah je me suis dis que j'allais venir t’embêter un peu... »
C'était simple, efficace et ça avait l'avantage d'être totalement vrais. C'est aussi parce que c'était l’occasion de ce distraire un peu histoire de pas avoir l'air d'un zombi à errer dans les couloirs avec ma mine triste et mes pieds traînants. Puis normalement il était pas si contrarié de me voir. Quelque chose allait pas, peut être qu'il m'évitait vraiment, que c'était pas juste un concours de circonstances. Cette idée me mis soudainement assez mal à l'aise la dernière fois qu'on s'était vraiment parlé c'était lors de mon escapade dans la foret, j'arrivais pas à me souvenir qu'on ai eu une autre conversation après ça et les derniers événement impliquant 'Pa m'avaient un peu fait perdre la notion du monde qui m'entourait. Alors il m'évite vraiment ? Mon regard s'encra dans le sien quelques secondes, j'avais très envie de poser la question, comme ça sans tact mais j'avais peur qu'il réponde oui, alors je préférais tourner ça autrement, avec un sourire qui plus est.
« Je sais pas j'ai l'impression que ça fait longtemps qu'on s'est pas parler. Non ? »
Mon regard glissa vers le télescope et les étoiles au loin dans le ciel. Ce détachement c'était un peu une forme de fuite, ou juste une manière de pas trop avoir l'air inquiet ou désolé, ou je sais pas trop quoi, je préférais garder un sourire plutôt que d'avoir l'air pitoyable à regarder mes pieds en cherchant quoi dire ou quoi faire. Puis comme ça c'est mieux pour tout le monde.
J’imagine que ça devait finir par arriver, que nos chemins devaient se croiser à nouveau. Et franchement, nos retrouvailles ne commençaient pas de façon idéale avec Kieran qui recommençait ses bêtises et sa façon d’agir, comme si rien ne s’était passé. Il s’approchait de moi et me souriait. Tsss. Je ne savais pas si c’était parce que j’étais en colère contre lui mais ces sourires me paraissaient différents. Autrefois ils me semblaient stupides mais plein d’une sorte de joie stupide. Maintenant ils me semblaient vide. Je sentais la colère remonter, bouillonner lentement mais sûrement en moi.. C’était particulièrement ennuyeux. Toute ces reproches, ce sermon que j’avais malgré moi préparé et que j’avais allongé jour après jour, il revenait et il ne demandait qu’à sortir. Mais je ne pouvais pas. Je n’avais pas le droit. Je devrais laisser tomber, pardonner. Et pourtant je sentais cette boule remonter du fond de mes estomac vers ma gorge.
Le gryffondor justifiait sa présence ici parce qu’il n’arrivait pas à dormir. Trop énervé ? Je voyais mal Kieran ne pas trouver le sommeil à cause du stress des examens ou parce qu’il avait l’amour en tête. C’était peut-être cette histoire de dragonrun qui le travaillait. Et ça je pouvais comprendre. Par contre, choisir de m’embêter comme divertissement ou boule anti-stress, c’était tout de suite moins compréhensible.
«Hum.» me contentais-je de de dire, un peu hautain.
Je craignais qu’en ouvrant la bouche, des mots que je ne maîtrisais pas finiraient pas sortir et s’envoler. Et je savais que les mots pouvaient blesser autant que des couteaux, donc j’essayais de m’abstenir. Et pourtant je savais que la meilleure chose à faire, c’était de vider mon sac. Mais je ne pouvais pas. Pas tout de suite. Même si ici, la situation était propice. Je frottais de nouveau mon oeil, ça commençait à aller mieux et je pouvais désormais l’ouvrir. Il me regardait avec ses grands yeux, comme s’il voulait vraiment me demander quelque chose. Moi je regardais ailleurs pendant un moment. Est-ce que je devrais fuir ? Récupérer mes affaires et partir ? Non. peut-être, pas.
« Oui, c’est vrai.»
Pas la peine de le nier, le rouquin n’était pas si stupide. Et pourtant j’avais très envie de lui parler et en même temps, pas du tout. Je relevais légèrement la tête, croisais les bras en le confrontant du regard, ajoutant d’un ton sérieux:
« Mais pourquoi est-ce que tu voudrais me parler de toute façon ? Et de quoi ? »
C’était un affront direct, passif-agressif même. C’était bas. Ca ne me ressemblait pas vraiment. Mais c’était une façon comme une autre d’essayer de communiquer et peut-être d’arriver au coeur du problème.
Peut être que je lui avait vraiment fait mal. Il avait l'aire toujours un peu remonté contre moi et ce massa l’œil une dernière fois avant de planter son regard dans le miens, les bras croisés et l'air toujours aussi contrarié. Il avait déjà perdu patience, en générale ça met quelques minutes à arriver et encore, c'est toujours bon enfant. Là j'avais juste l'impression qu'il me manquait quelques élément pour vraiment comprendre son attitude. Il ronchonne vaguement, je le sentais un peu tendu ou juste vraiment excédé par ma présence. Il avait un devoir à finir certainement, je lui faisais perdre du temps mais j'avais pas souvenir que Rief soit du genre à envoyer les gens chier pour ça. Ou alors c’était juste parce que c'était moi. Une boule d'angoisse ce logea au creux de mon ventre à cette simple idée. J'aurai aimé me dire que je me trompe et que j'avais rien fait qui justifiait un comportement pareil, mais la vérité c'est que Rief avait tout un tas de raison de m'en vouloirs, peut être que j'avais atteins sa limite, ce serait pas la première fois que ça arrive, mais en y réfléchissant y'avait surtout un truc qui me semblait évident maintenant. Il m'en voulait encore pour la foret.
Cette fois j'en était quasi certain. Même si je me doutais qu'il l'aurait mauvaise quelques temps, je crois que je me suis jamais imaginé qu'il soit vraiment en colère contre moi. Mais là il l'était carrément. Pourquoi je voudrais lui parler ? Sérieusement ? J'en restais un peu bête à le fixé sans rien dire. C'était peut être une façon pour lui de me dire qu'il avait pas envie de parler, parce que jusqu'ici ça l'avait jamais gêné que je l'aborde juste comme ça, sans vraiment de but ou de choses à lui dire. J'ouvrais la bouche pour répondre mais me ravisa dans un soupir. Pour un fois c'était le moment de réfléchir avant de parler ou d'agir. Ça fera de mal à personne.
« Tu sais bien que j'ai pas besoin d'une raison précise pour avoir envie de te parler ... »
J'essayais toujours de sourire mais il faut avouer que ça manquait cruellement de sincérité ou juste d'émotion. J'en soupirais un peu en passant une main dans mes cheveux, le regard fuyant pour une fois. Mais j'aimais pas qu'on me regarde comme ça ça me me foutait toujours mal. Puis c'était déjà assez bizarre comme ça, comme si personne osait vraiment parler de peur de ce qui allait arrivé ensuite, et je trouvais ça juste carrément ridicule ! C'est juste débile, après tout si on a un truc à dire on a cas le dire au lieux de rester là à attendre que quelque chose passe, c'est pas comme ça qu'on règle quoi que ce soit et j'avais pas l’intention de repartir d'ici sans que tout soit clair. Je déteste les secrets ou les non dit, ça me ronge jusqu'à ce que j'en craque.. et en général, quand je craque ça arrange encore moins les choses. Mon regarde ce braqua sur lui une nouvelle fois peut être un peu incertain mais au moins je le regardais dans les yeux.
« T'es encore fâché contre moi c'est ça ? »
Peut être que j'avais moi même appuyé sur le détonateur, il allait peut être m’exposer à la figure mais au moins il fera quelque chose d'autre que simplement rester là à me sortir son regard noir et son air trop sérieux, c'est la première fois que je le voyait réellement fâché, pourtant j'en avait déjà fais des conneries mais cette fois j'avais la sensation que c'était un peu différent, mais je ne parvenais pas à comprendre pourquoi . Alors, oui, fallait vraiment qu'il me le dise.
Je sais ce que vous allez me dire. C’est mauvais pour la santé et pour le karma d’être en colère. Et puis, regarde-le le pauvre avec son air de chien battu. Mais je ne parvenais juste pas à laisser tomber. J’essayais de me justifier en me convainquant que c’était sans doute la goutte d’eau qui avait fait déborder le vase, que c’était peut-être à ce niveau là que je traçais une ligne. Et qui je laissais passer ce genre de comportement sans la moindre représailles, c’est que c’était moi qui avait un problème. Et apparemment le principal intéressé avait compris que quelque chose clochait chez moi puisqu’il soupirait. Et même si ce qu’il disait était assez touchant - et ça aurait fonctionné à 100% en temps normal - je maintenais ma garde, déterminé à ne pas montrer le moindre signe de faiblesse. Je gardais les lèvres serrées. “ Tu sais bien que j'ai pas besoin d'une raison précise pour avoir envie de te parler” Ne dis pas des choses pareilles.Ca me ramenait quelques années en arrière, quand les gens ne m’adressaient la parole que pour savoir où se trouvait le local du cours de défense contre les forces du mal ou encore souhaitaient m’emprunter mon devoir de potion pour “comparer”. Mais c’est vrai, on ne pouvait dire que Kieran Nails agissait comme quelqu’un d’intéressé. Il se contentait de faire ce dont il avait envie, sans intention cachée. C’était ce manque total de calcul qui faisait de lui ce qu’il était. C’était en partie cela qui le rendait à la fois stupidement adorable mais aussi terriblement irritant.
Il essayait de sourire mais je voyais très bien qu’il ne faisait pas le fier. Et aussi cinglé que je puisse l’admettre, c’était l’effet recherché. Et puis finalement, après m’avoir évité du regard, il osait finalement m’affronter et poser la question fatidique. Voilà, c’était fait, il avait appuyé sur la détente. J’essayais de rester calme et maître de moi, sachant que ça allait être une épreuve vu tout ce que j’avais à lui balancer.
«Est-ce que je suis encore fâché contre toi ? Evidemment que je suis encore fâché contre toi ! Tu veux savoir pourquoi ?»
Je n’attendais pas de réponse de sa part, parce qu’il le veuille ou non, il allait prendre cher. C’était le fameux moment de remontage de bretelle ( bien qu’il n’en portait pas- c’est une figure de style). Mais maintenant que j’y étais , je ne savais plus par quoi commencer. L’air embêté, je tapotais rapidement du bout des doigts sur mes lèvres qui brûlaient de lui expliquer ma façon de penser. Mes lèvres s’étirèrent en un sourire mauvais.
« Mon dieu, je ne sais même pas par où commencer. Tu sais quoi ? Procédons avec méthode. Faisons une liste. Alors….»
Je ne pouvais pas rester en place alors que j’énumérais la liste de ses fautes en comptant sur mes doigts. Parfois j’avançais vers lui, parfois je reculais. Par moment même je lui tournais le dos. Et le volume et le débit de ma voix augmentait à chaque point, en même temps que mon énervement.
«1) Tu as mis ta vie en danger pour quelque chose de stupide. Okay. Ca on l’a couvert la dernière fois. 2) Tu as violé le règlement, pas bien. 3) Tu as fait ces deux choses APRES m’avoir promis d’essayer de te tenir tranquille. C’est toujours sympa à entendre ça. Car oui, tu dis qu’on se parle mais au final, on parle, mais je suis le seul à écouter. 4) Avec tes conneries, t’as mis ta soeur en danger. Qu’est ce que tu aurais fait si, je sais pas moi, si elle était allée seule dans le forêt et qu’elle soit tombée sur une créature. Non. Mieux. Elle aurait pu simplement faire une chute dans un ravin par accident et hop. Fini. L’accident stupide. »
Oui je sais. Après le deuxième point ça devenait personnel. Je m’en rendais compte. Mais attendez, il y en a toujours plus d’où ça vient. Parce que à partir de ce moment là j’ai arrêté de compter.
«Mais tu te rends compte ??? Non, t’étais pas là. Ta soeur c’était une EPAVE. UNE EPAVE, KIERAN. Je l’ai jamais vue comme ça. C’était...hm. Tu réalises ce que tu fais aux gens autour de toi quand tu fais une connerie comme ça ? Tu réalises à quel point tu les blesses ?!! Tu réalises à quel point tu peux être égocentrique ?!Et s’il t’était arrivé quelque chose ?!!! Comment tu crois que ta soeur se serait sentie ?!! Mais ça j’imagine que tu n’y as pas pensé ! »
J’avais terriblement envie de le prendre par les épaules et de le secouer. Si seulement ce crétin ne faisait pas la même taille que moi ! S’il seulement il était plus petit. Ca aurait tellement plus d’impact. Mais je me contentais de serrer les poings et de les relâcher. Marquant une pause pour récupérer mon souffle.
« Et tu sais c’est quoi le pire dans cette histoire ? C’est que moi, je me suis laissé embarqué là dedans. JE ME SUIS INQUIETE ! Tout ça à cause de toi et tes petits numéros d’alterner entre dire des trucs idiots et des trucs intelligents, sincères et émouvant. Ouais. Tu sais de quoi je parle. Ton petit numéro d’idiot attachant. Et bien si tu comptes mettre ta vie en danger tous les deux mois, j’en veux plus. Parce que le jour où il t’arrivera vraiment quelque chose, ta soeur elle aura le droit d’être une épave. Pas moi. »
En effet, je n’étais même pas sûr que nous étions amis. Et maintenant que c’était dit, je ressentais un certain soulagement.
Je crois que je m’étais pas tellement imaginé qu'il serait énervé à ce point là. Je sais que je l'ai cherché, que je voulais qu'il me le dise mais je crois que j'aurais aimé que ça ce passe un peu différemment, plus calmement ou simplement avec un Rief qui serait pas en train de me fusiller du regard. Je l'ai jamais vus si énervé, s'en était un peu choquant en faite, surtout quand c'est à cause de moi. Je pensais pas qu'il aurait prit ça tellement à cœur, mais ça c'était moi. Moi et ma manie de toujours relativisé et de jamais rien prendre vraiment au sérieux. J'avais pas envie d'entendre tout ce qu'il y avait sur sa liste finalement, aprce que je suis certain que tout ce qu'il dira sera un peu trop blessant ou simplement trop vrais.
Mes yeux restaient fixé sur le sol alors qu'il tournait en rond devant moi. Il s’agitait , il criait presque parfois. J'aurais aimé pouvoir disparaître, là, tout de suite, faire comme si j'avais jamais existé, comme si rien de tout ça était arrivé, mais c'était pas possible, alors je restais la en laissant mes mains triturer machinalement le bas de mon débardeur. Chacun de ses mots se gravaient au fond de mon crâne simplement pour être certain de ne jamais les oublier. Ça me faisait l'effet d'un coup de massue en pleine poitrine. Finalement je comprenais que je l'avais surtout déçus. Je lui avait menti, ou plutôt j'ai été incapable de tenir ma promesse même si j'avais une très bonne raison de le faire. Sauf qu'il voulait pas l'entendre, je suis même pas certain qu'il voulait la comprendre en réalité mais ça m'est égale. C'est sur que ça leurs semble stupide, mais ça l'était pas pour moi. Je m'y était surtout mal prit au final. C'était stupide d'aller dans la foret, je le sais. Ça avait rien à voire avec les conneries habituels que j'avais l'habitude de faire pourtant il en parlait comme si c'était la même chose.
J'eus envie d'ouvrir la bouche une dizaines de fois mais j'avais une boule d'angoisse et de culpabilité qui s'était logé dans ma gorge et m’empêchait presque de respirer. Il arrivait pas à pardonner que j'ai pu mettre Aili en danger. Parce qu'elle était têtu comme moi et qu'elle aurait put y rester. Il parlait comme si je le savais pas. Les souvenirs de cette acromentule gigantesque essayant de me bouffer ce soir là me revinrent immédiatement à l'esprit et m'en glaça le sang d'un frisson douloureux. Je m'en était sorti simplement parce que le prof était intervenu. On s'est vus mourir plus d'une fois. S'il s'imagine que je me rend pas compte de ce qu'Aili aurait put vivre, il ce trompe assez. J'étais conscient que c'était égoïste, du moins je m'en était rendu compte mais c'était pas ce que je voulais, il voulait même pas essayer de comprendre que j'étais désolé et que j'avais jamais voulu inquiété qui que ce soit. Surtout pas lui ou Aili. Il en avait marre de s’inquiéter tout compte fais.. parce que ça finissait par le bouffer lui aussi au finale. C'est peut être ce qui me rendais un peu plus coupable et triste qu'en arrivant. Ça avait complètement dégénéré.. mais oui, c'était ma faute.
J'en soupirais un peu sans tellement m'en rendre compte. Une mains quitta le tissu noir pour venir ce perdre sur mon visage, massant distraitement ma tempe ou ma nuque. J'avais l'impression de répéter le même schéma une fois de plus. Je vais trop loin, je déçois, je m'excuse, mais c'est trop tard. Ensuite vient le silence et la distance. C'était toujours comme ça. Ça finit toujours comme ça, et plus je m'accroche, plus ça finit par les faire fuir. Des fois je me dis que je devrais simplement être plus comme Aili, imperméables à toutes relations ou au moindre attachement. C'est quoi le pire ? S'attacher aux gens et passer son temps à les décevoir, ou s'attacher à rien et ne décevoir personne. L'un comme l'autre, y'avait juste pas de solutions. J'osais un regard vers lui, luttant contre cette sensation douloureuse au fond de ma poitrine simplement pour ne plus regarder mes pieds comme un gamin qu'on engueule. Je n'essayais même plus de sourire, j'en avait plus l'envie, et plus tellement la force non plus.
Un silence pesant s’installe. Je lui jetais des regard furtif, ouvrant quelques fois la bouche pour parler mais me ravisant tout aussi vite. Dire « je suis désolé » me semblait assez fade. Peut être même vexant. « Ça sert à rien d'être désolé maintenant que c'est fait », c'est exactement ce que 'Pa avait dit, et curieusement j'avais pas de mal à imaginer Rief en faire autant. Pourtant il fallait bien lui dire, même si c'est que des mots et même s'il voulait pas l'entendre.
« Je sais que tu veux pas entendre ça mais je suis désolé. Je voulais pas que ça finisse comme ça. T'as raison j'ai pas réfléchi, et si j'avais su que toi et Aili allaient venir c'est évident que j'y serait pas allé. Je pensais juste... Je voulais juste récupérer mes affaires ! Je pensais pas que ça dégénérerai comme ça. Jamais je mettrai Aili en danger volontairement, ni toi ni qui que ce soit. Je suis pas allez là bas pour faire mon intéressant ou juste frimer. Je voulais juste retrouver mon sac... et ça a mal tourné.. Je me rend compte de ce qui aurait put arriver. Crois moi je le sais parfaitement. Je veux juste.. je sais pas.. je veux juste dire que je m'en veux, que je me sens mal à cause de ça, que j'aimerais que ce soit jamais arrivé mais je sais qu'on pourra plus rien y faire maintenant. »
Je fis une courte pause pour reprendre mon souffle, soupirer un coup et bouger de quelques pas pour m'aider à réfléchir. J'avais rien pour me justifier mais j'essayais quand même de me faire comprendre, même s'il avait l'air de plus vouloir entendre parler de moi. C'est peut être la chose la plus difficile à entendre jusqu'ici. Abandonné, encore, ça devenait un peu trop répétitif ces derniers temps.. Je pris une grande inspiration avant de poursuivre, c'était toujours maladroit et un peu brisé par l'émotion, mais au moins j'essayais de lui faire comprendre.
« Je me rendais pas compte de ce que ça vous faisait et crois moi, j'ai jamais voulu te blesser ou te décevoir... mais c'est quand même arrivé, y'a rien que je puisse faire pour effacer ça sauf dire que je suis désolé, parce que je le suis vraiment... si tu veux plus me voir un moment je comprend .. et je t'en veux pas.. j'cois même que c'est plutôt bien fait pour moi au final... »
J'avais du mal à le regarder dans les yeux, un peu trop accablé par la honte et le remord, mais surtout ce sentiments de détresse. Je pouvais m'en prendre qu'à moi même et y'a des fois ou j'en venais à sacrément me détester. Peut être qu'on a juste ce qu'on mérite dans la vie, finalement tout à une conséquence et y'a bien un moment ou il faut arrêter de faire comme si on s'en fichait. J'étais pathétique, blessé, peut être que si je me jetais de ce balcon ça irait mieux.
Je dois l’admettre ça faisait un bien fou de vider son sac. J’aurai dû le faire il y a bien longtemps, j’avais l’impression que le poids sur ma poitrine venait de s’envoler. Non. C’était plutôt comme un volcan qui avait expulsé toute sa lave et qui pouvait désormais retourner tranquillement en phase de sommeil. J’avais fini par dire tout ce que je souhaitais lui dire ce soir là, mais que j’avais gardé pour moi. Parce que je n’avais aucune légitimité envers lui, aucune justification pour l’engueuler à part mon rang de préfet. Et encore je n’étais même pas le préfet de sa maison. Et comme je le disais, je n’étais rien par rapport à lui. Nous n’avions pas tellement de points communs. On ne pouvais même pas dire que nous étions amis. C’était pour ça que j’avais eu l’impression d’avoir un morceau de scotch collé sur la bouche. Ce n’était pas mon rôle de l’engueuler. Et pour les mêmes raisons, qu’est-ce que ça aurait pu lui faire ? Il se contenterait de faire son regard de chien battu, de dire “oui, je ne le ferai plus” et de continuer. Mais au moins, maintenant, j’avais la satisfaction d’avoir pu exprimer mes sentiments sincèrement au lieu de les garder refoulés à l’intérieur de moi. Et ça c’était pire que la trahison. Cette sensation de n’avoir rien à dire puisque je n’avais pas d’importance.
Et pendant que j’énonçais ses fautes, je ne faisais pas attention à lui. C’était seulement à la fin que j’observais et que je réalisais que, contre toute attente, mon discours lui avait fait de l’effet. Il ne souriait plus, il avait vraiment l’air désolé et presque triste. Voilà qui changeait un peu. Il fit une tentative pour s’excuser mais ce n’était pas franchement convaincant. Oui il avait l’air de regretter son geste, mais… comment dire. J’aurai espéré qu’il grandisse un peu et qu’il arrête de faire des conneries. Il disait qu’il se sentait mal à ce propos, mais ne disait rien sur le futur. Qui sait, peut-être qu’il avait appris sa leçon. Ou pas du tout. Je ne pouvais pas le savoir de toute façon. Il n’y avait aucune certitude à avoir à ce sujet.
Ensuite, le visage bas il me disait qu’il comprendrait si je ne souhaitais plus lui parler temporairement. “ Pour le moment” comme si je ne pouvais que le pardonner au final. Sacré Kiki. En plus c’était pas comme si je cherchais à lui parler, c’était lui qui avait l’habitude de traîner dans mes pattes. Cet idiot. Je me passais une main à l’arrière du crâne et je fermais les yeux un instant pour réfléchir. Qu’est ce que je devais faire ? Le rejeter encore plus ? Maintenant que j’avais pu dire ce que j’avais sur le coeur, je ne me sentais plus tellement en colère. Je lui en voulais toujours un peu, mais le truc c’est qu’on ne pouvait pas changer le passé. Donc ça ne servait pas à grand chose de continuer à lui faire des reproches et à lui faire payer son erreur. Mais d’un autre côté je ne pouvais pas lui pardonner si facilement. Je poussais un soupir avant de dire :
«T’es un idiot, Kieran. .»
Ce qui, une fois de plus, semblait bien résumer la situation. Mais pas seulement. Après mûre réflexion je décidais de le laisser un peu tranquille. Mais juste un peu.
« Si tu ne veux plus me parler c’est toi qui vois mais… en ce qui me concerne je pense que t’as déjà été assez suffisamment engueulé et puni. J’espère que tu as compris la leçon. J’avais juste besoin de…t’engueuler un peu moi aussi. Même si, normalement, je n’ai pas le droit de le faire. »
Plus calme, je reprenais :
« Donc, si tu veux, tu peux toujours venir me parler. Mais à partir de maintenant, tu n’auras plus droit à un traitement de faveur, c’est compris ? »
Je fronçais un peu les sourcils en mode préfet pour lui faire comprendre que je ne plaisantais pas. Ca voulait dire qu’il risquait bel et bien de perdre des points et d’être présenté au directeur à la moindre connerie. Oui. Sans remords, en plus. Je me tournais alors vers mon téléscope pour reprendre mes activités et essayer d’alléger un peu la conversation :
« Sinon… c’est la dragonrun qui t’empêche de dormir ? »
Je sais pas tellement si ça avait servi à grand chose de m'excuser mais au moins c'était fait et je ne vivrais pas avec le regret de ne jamais l'avoir dit. Il restait là planté devant moi avec son air sérieux. Bizarrement j'avais une certaine angoisse à rester là à attendre qu'il décide de s'il voulait ou non m’éjecter définitivement de son champ de vision. S'il décidait de le faire je crois que j'aurais simplement plus rien pour le convaincre de ne pas le faire. En y réfléchissant c'était toujours moi qui venait me coller dans ses pieds ou qui prenait l'initiative d'aller lui parler. Lui ne faisais que m répondre et acceptait simplement que je reste avec lui quelques temps. Peut être que finalement il avait jamais vraiment apprécié cette compagnie. Trop gentil pour refusé ou simplement du temps à perdre. Me voir dégager changerait pas grand chose pour lui, juste le fait qu'il aurait moins de soucis à ce faire. Finalement c'était même plus un avantage qu'autre chose.. ; et c'est sûrement ce qui me rendait le plus triste.
Il me traita d'idiot, ça a eu l'avantage d'esquisser un sourire sur mes lèvres. C'est vrais que j'étais idiot, il le répétait assez souvent alors, quelque part, c'est stupide mais c'était un peu réconfortant.Le silence retomba quelques secondes, il semblais réfléchir et franchement j'avais pas tellement envie de l'interrompre avec une nouvelle plaidoirie. Il décida finalement que le choix m’appartenait, il y mettait simplement quelques conditions. Mon regard s'était instantanément braqué sur lui, la tristesse y logeait toujours mais il retrouva un minimum d'éclat. Il m'avait pas jeté, rien qu'à cette idée je me sentais un peu soulagé et j'arrivais de nouveau à le regarder dans les yeux sans me sentir comme le pire des mecs. Je pouvais, si je voulais, à aucun moment il n'exprima ce qu'il aurait aimé lui. Il pouvait pas m’engueuler comme ça et jouer l’indifférence ensuite, mais il avait toujours gardé une certaine distance, un détachement vis à vis de nos échanges réguliers. Je sais même pas comment définir notre relation, pour moi je le rangeais dans la catégorie des amis, comme la plupart des gens qui j’apprécie et dont le sort me préoccupe un minimum. Mais c'était juste moi, moi qui m'attache trop, moi qui m'attache facilement sans vrais raison, du moins pour le monde qui m’entoure. Je sais pas tellement ce que j'étais pour lui, mais maintenant j'étais plus que le gars un peu collant qui viens traîner dans ses pattes quand il demande rien. C'est mieux qu'être rien du tout de toute manière.
Il finit par arrêter de me regarder avec cet air sérieux. J'avais simplement acquiescé d'un signe de tête pour lui dire que j'avais bien compris la situation. Maintenant qu'il avait poussé sa gueulante je devais avouer que je me sentais toujours un peu mal, mais fatigué également. Une fatigue morale, celle qui fais soupirer et qui donne envie de ce terrer dans un coin et s'y rouler en boule le temps que tout autour disparaisse. J'avoue que ça me semblait être un bon plan en faite, je serais même déjà parti pour le laisser si j'avais eu de quoi écouter ma musique. Parce que le silence c'était pire que tour dans ce genre de cas.
Mon regard vagabonda sur le balcon quelque secondes, Rief avait repris son observation, le nez collé au télescope, j'arrivais pas à me décider si je devais partir ou rester et sa question n'aida pas tellement. La dragonrun. Je l'avais presque oublié celle là avec tout ce qui s'était passé. Un détail qui s'était tassé dans un coin de mon esprit, bousculé par le reste, piétiné par des événement plus graves et noyer sous des sentiments plus forts. Je restais silencieux un instant, réfléchissant à quoi répondre, j'aurais pu dire oui, simplement, on allait pas encore avoir ce débat de toute manière, mais j'avais pas envie de lui mentir, j'avais peut être pas plus envie d'en parler non plus mais lui servir un mensonge juste après cette maigre réconciliation m'était simplement impossible.
« Non c'est .. d'autres trucs.. »
Génial comme explication. J'avais envie de me frapper la tête contre le mur et me contenta d'en soupirer longuement, affligé par mon incapacité à gérer ce genre de situations. Une main ce posa sur mon visage pour y balayer la fatigue et me laisser le temps de me constituer un sourire un minimum convainquant.
« Mais c'est pas important... »
Puis il s'en fiche probablement de toute façon. J'allais pas lui larmoyer dans les oreilles après ce qui s'était passé. Je profitais de l'espace sur les balcons pour m'approcher du bord et m'avachir sur le rebord de pierre en croisant les bras. La nuit était calme, elle semblait d'autant plus calme maintenant que l’orage était passé. Pourtant j'arrivais pas à chasser la mélancolie qui venait ronger un peu plus ma bonne humeur. J'avais envie de manger de la glace, ou du chocoatl, mais j'en était privé. J'avais envie d'être seul aussi, au fond, tout au fond de moi je savais que c'est ce que je voulais, mais j'arrivais pas à partir, parce que même si c'est ce que je voulais, c'est pas ce qu'il me fallait.
« Alors.... c'est quoi ton devoir ? Je savais pas que vous aviez astronomie dans votre cursus. »
Autant continuer sur cette lancé, et puis dos à Rief, j'avais presque l'air normal même sans le sourie idiot qui ne trouvais plus sa place sur mon visage.
Maintenant que j’avais poussé ma gueulante et que je me sentais mieux, je pouvais passer à autre chose et laisser ça de côté pour le moment. Je n’avais plus de rancune, plus rien contre lui. Ce qui avait été gardé sous silence était désormais connu de l’intéressé et je pouvais retourner vaquer à mes occupations avec le même calme qui m’animait chaque jour. Kieran acquiesçait, il avait compris que désormais il devait se tenir à carreaux. Je pouvais toujours m’inquiéter sur le futur ou douter de son honnêteté. Mais à quoi bon ? Ce qui devra arriver arrivera et c’est tout. Je ne pourrais probablement pas l’empêcher. Mais j’avais l’impression que Kieran avait encaissé un gros coup et que ça le ferait réfléchir. Au moins pendant 5 minutes, le temps qu’il redevienne lui-même. Donc mon attention se porta sur mon téléscope, après tout, j’étais là pour une raison, mais je lui faisais savoir que j’étais ouvert à la conversation. Je m’inquiétais un peu de son manque de sommeil, mais apparemment j’avais tort, ce n’était pas le dragonrun qui le travaillait. Il ne voulait pas m’en parler. Je ne m’en offusquais pas, c’était sans doute quelque chose de personnel, quelque chose dont il n’avait pas envie de me parler. Même le gryffondor avait le droit d’avoir des secrets et il était parfaitement en droit de ne pas me juger digne de les entendre.
J’espérais juste que ce n’était pas quelque chose d’illégal ou qui allait contre le règlement. Bref. Quoi qu’il en soit je n’allais pas le pousser sur ce sujet. C’est alors qu’il me lança sur l’astronomie. j’ôtais un instant mon regard du téléscope pour noter les coordonnées sur un morceau de parchemin.
«Ouais, hein ? Je sais pas trop à quoi ça sert, à part la lune et le mouvement de certaines planètes dans la récolte de certaines plantes ou le traitement de certaines maladies...Ce n’est pas si important. J’ai l’impression que c’est plutôt un cours éliminatoire. T’as pas de cours comme ça dans ton cursus ?»
En fait j’étais presque sûr qu’il manquait des cours à notre option ( parce que Poudlard ne trouvait pas de professeur qualifié), on nous refilait des cours un peu inutile. En quoi c’était intéressant au niveau médicomagique de connaître les constellations ou la compositions des lunes d’Uranus ? Je ne voyais pas. Je me tournais vers Kieran.
Il avait pas insisté. Je sais pas si je me sentais soulagé ou pas. J’étais comme ces gens chiant jamais satisfait, qui font la gueule si on insiste pas et qui rembarrent si on le fait. Mais c'est mieux qu'il demande pas, peut être que j'assumais pas tellement, puis j'avais Aili pour en parler même si elle voulait pas le faire et ce contenter de grommeler dans son coin. Au moins il pouvait être rassuré, j'étais pas prés de me laisser embarquer dans les ennuis une fois de plus. J'imagine qu'il serait satisfait de le savoir, peut être même que j'aurais eu le droit à un « je t'avais prévenu », ou un truc comme ça. Ouais, c'est mieux comme ça.
J'écoutais vaguement ce qu'il disait, visiblement il aimait pas plus l'astro que ça, du moins il comprenait pas pourquoi il devait ce coltiner cette matière dans son cursus Medicomagie. C'est vrais que je voyais pas tellement le rapport, sauf pour tout ce qu'il avait dit, les plantes et certain soins qui nécessitaient une certaine position de lune ou d'étoiles, pourtant c'est une matière intéressante mais je voyais pas tellement ou est ce qu'on pouvait la caser pour qu'elle soit réellement utile. Fallait juste avoir envie d'étudier ça, être passionné ou vouloir aller là haut et voir tout ça de ses propres yeux. Si j'avais l’éternité devant moi c'est certain que je serais allé là haut au moins une fois. Mais j'aurais jamais le temps de faire tout ce que je veux, ça restait quand même un beau rêve. Il me retourna la question, savoir si j'avais toujours ça en option. Vraiment ? Je m'étais vaguement redressé sur mon rebord de balcon, soupirant peut être un peu plus que je ne l'aurais voulu, je mettais ça sous le coup de la fatigue et du reste.
« Je suis en troisième année Rief, j'ai pas de cursus, j'ai que les matières de base ... alors oui .. j'ai aussi astro. »
C'était pas trop nul, puis ça allait de paire avec la divination sur certains points. Je me demandais ce qu'on apprenait plus loin dans les années. C'était peut être un peu plus intéressant que ce qu'on faisait actuellement. J'espère sinon je crois vraiment que les gens auront déserté cette matière depuis un sacré bout de temps. Rief me proposais de venir jeter un œil. Mon regard ce tourna brièvement vers lui le temps d'étudier la question. Après tout pourquoi pas. Je voulais pas donner l'impression de bouder dans mon coin, et puis il faisait des effort pour reprendre un échange normal. Je lui glisse un sourire pas plus convainquant que les autre et lâche mon balcon pour faire quelques pas vers lui et coller mon œil sur l'objectif. J'avais pas de lunettes et pas de lentilles, donc en faite je voyais pas grand chose d'autres que des étendues de lumière. Mes mains bidouillèrent un peu l’appareil pour y faire quelques règlements et me permettre de distinguer un peu mieux les astres lumineux. Voir le ciel sous cet angle ça donnait vraiment envie de s'y perdre.
« J'avoue que je sais pas trop ce que le regarde .. mais c'est jolie. »
Je relevais le nez de son télescope pour braquer mon regard sur les étoiles au loin. Je crois que je pouvais rester des heures comme ça à simplement les observer et faire un millions d'hypothèse sur ce qui pouvait s'y trouver. Peut être même que j'aurais profité de la présence de Rief pour le soûler avec mes histoires. J'avais d’ailleurs ouvert la bouche dans un demis sourire mais m'étais rapidement avisé. Il avait peut être envie de faire son devoir plutôt que d'entendre mes conneries habituel, j'essayais d'être plus calme et modéré comme il le demandait tout le temps alors je me contente d'un silence en lui rendant la place.
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