the tide took her away •• STELLA

Née à l'hôpital Sainte-Mangouste en Angleterre. C'était il y adix neuf ans. Une Sang-Pur fruit du marriage de Zakaria Abraham Grant et Cassie Camélia Sinclair. Le patronyme maternel car elle en est la dernière héritière. La devise familiale clame haut et fort « fiers et purs ». Un peu désuet à son goût. En cinquième année à Poudlard, elle étudie la coopération magique. Passe son temps à se plaindre des Duels Illégaux et des Dragonruns elle sympathise avec les MCDP mais n'en est pas membre pour autant. (car potentiellement si sa répartition le permet j'envisage de la proposer en tant que préfète.) Sa baguette est en Orme et possède une plume de phénix. Son epouvantard prend la forme d'une grande ombre noire indistincte s'approchant d'elle. L'amortencia à son nez prend une odeur De musc blanc, de pain chaud et de savon. Sa mère lui a offert avant sa première année un chartreux s'appelant Ernest dont elle prend grand soin. Le patronus qu'elle conjure prend la forme d'un bouquetin. Apparemment le même que son arrière-grand-père paternel.

Parcours scolaire du genre exemplaire. Une bonne élève mais pas exceptionnelle exceptée en Potions, famille oblige. Elle poursuit à présent la matière en option. Ses professeurs ne trouvent rien à dire sur son attitude volontaire mais discrète. Elle a passé ses BUSES avec succès et possède son diplôme de transplanage. Plus tard ses parents souhaitent la voir accéder à un poste à responsabilité au sein du ministère de la magie.

Stella était austère.

Les épaules guindées, le buste droit.

Un si joli minois au regard éteint. Une moue placide.

Comme une grande dame des époques de naguère, une attitude singulière dont le semblant archaïque trop insolite tranchait à l’heure du présent - Stella venait certainement d’un autre temps, d’une autre époque. Les gens disaient que cette fille-là était un peu triste, ne savait pas s’amuser. Et parfois ils ajoutaient même qu’elle aurait d’avantage eu sa place dans un musée que dans un collège.

Dans le fond ils n'avaient pas tort.

Stella était anachronique ; Une Grant, une Sinclair. Son sang était pur, ancien, presque l’équivalent d’un titre de noblesse au sein de la société sorcière. Or si avec le temps ce statut est devenu progressivement désuet, sa famille en défendait farouchement et surtout désespérément les valeurs, rejetant avec violence la moindre idée de changement. Par fierté. Par Orgueil. Il était en effet plus facile d’admettre que c’était le monde qui ne tournait pas rond plutôt que d’admettre ses fautes. Et sa grand-mère disait toujours de manière opiniâtre aux diners du dimanche, qu’ils résisteraient à l’assaut furieux des vagues du temps. Le monde pouvait bien s’écrouler autour d’eux, la fière maison Grant demeurerait pour l’éternité parce qu’il en avait toujours été ainsi.

Donc il en serait toujours ainsi.

Pas comme toutes ces autres prétendues familles nobles en réalité des troupeaux de pacotilles, perdus en chemin. De la mauvaise graine. Des lèche bouses ne valant pas mieux que la racaille avec laquelle ils s’acoquinaient et osaient même se mélanger. Des traitres à leur sang disait-elle en fronçant les sourcils avec un dégoût suintant même de ses rides.

Stella était donc assermentée à une diatribe eugéniste, suprématiste, anti-moldus qu’elle se faisait un devoir d’écouter à chaque fois attentivement par sollicitude, par attachement. Malgré l’ennui du discours représentatif elle ne disait pas mot et les jambes croisées, s’asseyait les mains sur les cuisses faisant mine de s’abreuver de chaque mot. Mais son attention silencieuse n’était pas le symbole d’un accord tacite.

Tout le contraire. Stella comprenait.

Le monde vivait. Le monde grandissait. Le monde évoluait. Il s’agissait d’un ordre irrévocable et perpétuel. Mais Stella n’osait glisser son désaccord. Ne révélait pas sa position. Parce qu’elle était profondément et irrémédiablement attachée à sa famille. Conditionnée, programmée, abreuvée méthodiquement puis cuite dans un moule préfabriquée, elle est devenue un vestige du passé. La vitrine futile d’une époque révolue. L’art de la parole subtile, du regard éloquent et de la gestuelle fine. Elle incarnait une forme d’élégance discrète et sans fioritures, propre à la noblesse et c’en était indissociable de sa personne. Elle aurait voulu s’enfuir mais quand il s’agissait d’amour Stella ne savait pas dire non.
Alors Stella allait à contre temps. Et ravie sa grand-mère disait qu’enfin en voilà une ! De fille bien éduquée ! Pas comme toutes ses bécasses qui remuaient leurs fesses à tout-va et jactaient comme d’insignifiantes poules… Sa petite Safir, savait se tenir elle. Malheureusement mamie Grant était d’un égard tout particulier, jugeait avec une loupe trop vieille pour être pertinente. Car Stella était certes polie mais ne souriait jamais. Elle était courtoise mais ne comprenait rien aux plaisanteries. Elle n’était ni drôle, ni intéressante, ni sympathique. Elle n’utilisait jamais plus de mots que nécessaires parce qu’elle ne voyait pas l’utilité de faire de longues phrases quand on pouvait tout dire en une poignée de secondes.
Stella n’aimait pas ou ne comprenait pas les détours sinueux ou plaisants d’une conversation. Stella était si simple qu’elle en était presque abrupte. Surtout quand elle disait des vérités gênantes à la face des gens, partant pourtant de la bonne intention d'être honnête. Si elle était un vase, il n’y aurait aucune ornementation décorative ; Juste de l’ivoire brillante et blanche.

Alors forcément quand on grattait un peu sous son élégante apparence, il y avait trop de retenue pour être appréciée vraiment.
Et elle n’aidait pas du tout sa cause. Car Stella si rigide, si formatée, si droite ne comprenait pas pourquoi les autres ne s’en tenaient pas aux règles et choisissaient de dévier des sentiers battus. Naturellement le désordre, le bruit, le chahut, l’irritait. Elle les trouvait inconscients, ces camarades qui se jetaient des sorts au seul motif qu’ils possédaient des baguettes. Toute cette agitation fracassante avait le don de l’insupporter au plus haut point. C’était inutile, honteux et idiot. Alors elle devenait cette Stella dure et stricte que ses camarades n’appréciaient pas. Celle qui ne savait pas s’amuser et qui était constamment sur leurs dos, à leur parler avec ces grands mots qui ne voulaient rien dire et à les observer avec un regard assassin comme s’ils étaient les pires des criminels. Franchement, quelle plaie celle-là ! Les seuls moments où elle l’ouvrait c’était pour les ennuyer… Elle n'était pas vraiment méchante, juste terriblementchiante et sévère. On lui connaissait soit une expression sévère ou irritée. Difficile alors de la trouver aimable.
Mais Stella était ce genre de personne qui gagnait à être connue. Si elle s'était habituée à la solitude et n'était pas pas particulièrement loquace elle n'en demeurait pas moins capable d'éprouver une affection profonde. Parce qu’elle avait tant de mal à nouer des liens et à tisser des conversations, elle chérissait avec sa maladresse typique les rares amitiés qu’elle parvenait à faire éclore. Stella ne comprenait pas forcément tous les problèmes qu’on lui expliquait mais on ne pouvait lui reprocher d’essayer. Beaucoup trop de choses la dépassaient mais Stella tentait réellement et de tout son cœur même s’il n’y paraissait pas réellement. Parce qu’il y avait chez elle, un sens de l’honneur palpable. Cette envie profonde de ne décevoir personne ; Stella faisait toujours passer les besoins des autres avant les siens parce qu’elle se sentait si petite, si insignifiante face à la réalité des choses. Elle n’était qu’une pièce infime d’un rouage et n’aspirait qu’à jouer son rôle du mieux possible. Elle n’avait pas l’arrogance de se sentir importante. Simplement la prétention de pouvoir accomplir le devoir qu’on lui confiait.
Parce que Stella par dessus tout avait l'habitude de tout prendre au pied de la lettre, de faire ce qu'on lui disait. Elle aimait l'ordre et les cadres. Un monde bien rangé où chaque objet avait une place dans l'espace bien définie. Il lui fallait des buts clairs et définis sans quoi elle avait l'intention de ne pas avancer du tout ; Elle avait besoin de meubler son temps parce qu'elle dénigrait l'inaction et l'inactivité. Peu oisive, peu lascive, elle avait un sens des priorités auquel elle se cantonnait en permanence y refusant la moindre entorse.
Stella savait d'où elle venait. Stella savait où elle allait.

Elle est là et elle est insignifiante.

Elle ne comprend pas cette agitation dévorante, ces pulsions enivrantes.

Elle n’est même pas au courant de leur existence.

Parce que Stella savait les choses mais ne savait pas les autres.

Enfermée dans le carcan de son éducation Stella a grandi loin d’eux et de leurs jeux, loin des rires exaltés et des imaginations colorées. Stella a eu un monde social se résumant à deux êtres ; Sa mère, son père. Deux figures aimantes mais peu démonstratives. Une sphère sociale étroite à laquelle on ajoutait parfois d’autres membres de sa famille et quelques gens aux visages flous. Mais tout cela n’était que bref. Trop sporadique pour avoir eu un impact, trop insignifiant pour lui donner un ancrage définitif.

Mais tout n’est pas à jeter.

Gamine elle aimait ces siècles d’histoires réfugiés à l’ombre de son vieux manoir perdu dans un point indéfini du York, décorant les murs de portraits, couvraient les sols de tapis de Syrie, ornant les meubles de précieux bibelots. Elle ne rechignait pas à apprendre les noms insignifiants d’un long héritage généalogique, se plaisaient à entendre les anecdotes de son père, les souvenirs de sa mère. Avant d’être Stella elle avait toujours été une Grant. Une Sinclair. Alors elle a appris à se tenir droite. A parler comme une dame. A faire honneur au sang qui est le sien. Elle n’avait rien à redire d’une éducation stricte. Qui était-elle pour remettre en cause le travail de plusieurs siècles ?

Mais elle n’a jamais sombré dans les extrêmes.

Stella ne savait pas les autres mais savait les choses.

Fugitives dans les lectures de ses rares temps de loisirs, Stella a compris très tôt : rien n’est éternel, rien n’est immortel. Le temps engloutissait. Le temps submergeait. C’était une loi immuable et invisible.

Les Grant. Les Sinclair n’échapperaient pas à la règle.