Les abysses insondables. Des pièces manquantes dans un passé flou. Les briques ne savent plus s'emboîter correctement à présent. Tout n'est qu'un vague océan d'inconscience. Orhan, qu'as-tu fait ? Que t'es-t-il arrivé ?
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Le monde des moldus ne convenait aucunement à cette personnalité dominante, à ce talent qui germait lentement au fond de cet enfant, le rendant solitaire envers ce qui semblait pourtant être ses congénères, mais il n'y avait sa place. Comme si le monde qui se dessinait autour ne pouvait correspondre à cette aura qui perlait les pores de sa peau. Si sa mère l'avait su très tôt, sachant parfaitement reconnaître un sorcier quand ses orbes en croisaient un, il en fut autrement pour son géniteur. Une révélation qui avait engendré les premières complications dans la vie d'un enfant où tout aurait pu être banal. Mais le mensonge ronge rapidement et une mère qui craignait de dévoiler sa réalité à l'homme qu'elle aimait se voyait rapidement remerciée quand la vérité éclatait. Ce qui sort de la normalité fait trembler les hommes.
Quand bien même tout ceci pouvait être traumatisant pour un jeune garnement, se rendant compte que les mots pouvaient être plus violents qu'il n'y paraît, étrangement on sentait l'indifférence à bien y songer. Celle qui régnait au fond de ses yeux clairs qui fixaient les scènes inlassables de disputes en tous genres. Pénible. Aussi avait-il eu le luxe de remercier Poudlard d'exister, lui permettant de s'évader de cette réalité humaine bien pathétique à son sens.
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« Monsieur Ziegler, trois heures de retenue. Cela vous apprendra à vous rendre dans la forêt interdite avec vos petits amis. »La jeunesse avait entraîné bon nombre de tourments également à bien y regarder. Cette bande d'amis qui n'en avaient l'air que devant autrui quand cela l'arrangeait personnellement, avaient de quoi faire tourner les têtes des professeurs qui, bien vite, se trouvaient fatigués de les croiser à chaque incident ou presque qui survenait dans l'école. Parce que la tête blonde aussi intelligente soit-elle avait ce besoin de défi. Défier l'autorité, défier les aînés, défier les cadets, défier ses camarades de classes en quête d'une supériorité idiote muée par un instinct péniblement masculin et puéril. Il cherchait les emmerdes, il cherchait l'adrénaline pour donner un sens à ce quotidien futilement banal et routinier. Ce besoin de se prouver quelque chose en vain. Aussi bien en participer aux duels illégaux parfois qu'en jouant au quidditch quand cela avait encore de belles années devant lui. La petite tête blonde était autant réputée pour être un fauteur de troubles qu'un élève bon en cours.
« Quel gâchis de perdre son temps à chercher les ennuient. »Des mots qui se faisaient souvent entendre, mais le Serpentard n'en avait cure de ce que pouvait dire autrui. Il n'y avait que ce besoin puéril de se surpasser pour se prouver quelque chose en vain. Peut-être pour se prouver que les sang-mêlé avaient autant d'atout que ces peigne-culs de sang pur, qui sait. L'esprit insondable et incompréhensible du solitaire fut un bien grand mystère pour beaucoup, notamment ceux qui essayaient durement de l'approcher.
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« Nous allons nous intéresser aux Hippogriffes dans le cours d'aujourd'hui. Suivez-moi bien en rang s'il vous plaît. »Est-ce à ce moment-là, lorsque le garnement avait posé ses orbes clairs sur celle orangée de la bête qu'il s'était alors décidé sur ce qu'il souhaiterait un jour faire ? Parce que la solitude n'était pas incapable de s'éprendre d'être vivants. Il y avait cette attraction, cette curiosité, ce besoin de comprendre ce qui ne pouvait l'être par la parole vis-à-vis de la bête qui lui avait fait face à cet instant précis. Un souvenir que l'homme pouvait encore se remémorer comme si c'était hier. C'est cette curiosité qui avait poussé l'homme à se diriger dans cette direction.
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« Orhan !! C'est vrai ce qu'on dit mec, tu as décidé de rejoindre les traqueurs du ministère ? Je croyais que tu voulais aider les créatures et pas les capturer... »Une mine d'indifférence avait perlé sur les traits devenus adultes de l'ancien garnement qui, bientôt, terminerait ses études concernant les créatures magiques. On avait alors toujours noté aussi bien une curiosité envers les créatures de ce monde, mais aussi envers la magie noire. Ce qui avait conduit le jeune homme à se diriger dans ces deux directions aussi intrigantes que cela puisse paraître. Si sa réputation de petit merdeux avait conquis plus d'un au sein de cette école, il restait à présent une autre réalité selon les autres : Orhan avait un penchant pour les forces du mal. Mais jusqu'à quel point ? Dans quel sens ? Mué dans un silence et une solitude certaine, les doutes perlaient, mais le talent dont pouvait faire preuve l'incontrôlable gamin avait de quoi lui ouvrir des portes.
« Ouais, c'est ce que j'ai décidé de faire. Plus longtemps je serais traqueur, plus je verrais de créatures. »Concis.
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« Monsieur Ziegler, bienvenu au ministère de la magie. Monsieur Feuerbach ici présent sera votre partenaire à partir d'aujourd'hui, il vous expliquera plus en détails tout ce que vous devez savoir sur le secteur des traqueurs. »Une équipe ? Un instant les traits de son faciès s'étaient figés, bloqués dans une mine mécontente. C'était un fait à prendre en compte certainement, mais un fait qui n'avait guère eu le luxe de plaire au gamin âgé d'environ vingt-deux ans à ce moment-là. Pourtant, on ne lui laissait guère le choix à bien y songer.
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Vingt-cinquième année de la vie d'Orhan.
« ORHAN !! RESTE AVEC MOI. »Pourquoi ? Ces mots résonnaient encore à ce jour dans son esprit, inlassablement les nuits n'avaient de cesse de lui rappeler ces quelques mots seulement dont la voix se faisait si familière. Il s'agissait sans nul doute de son principal partenaire de traque au ministère de la magie, George Feuerbach. Le sang-mêlé à moitié allemand de dix ans son aîné. Cet homme qui avait su infiltrer les barrières solides de la solitude du blond pour se faire une place de choix : son mentor. Cette personne qui avait su insuffler le respect à cette tête de pioche. Un ami, un camarade, un frère. Et cette seule phrase qui ne cessait de reboucler dans son esprit. Pourquoi ?
Le néant. Il se dessinait si férocement, voilant les derniers souvenirs de cet homme et quand bien même il cherchait encore à ce jour, personne ne savait dire où était passé George. Orhan se souvenait de cette mission qui consistait à s'approcher d'un Sphinx. Créatures violentes et dangereuses néanmoins capables de parole, de tenir une conversation même. On raconte que les Sphinx avaient servi les sorciers, notamment à garder leur trésor. C'était leur mission. Trouver un Sphinx en particulier, mais même les détails s'étaient envolés alors. Quel Sphinx ? Pourquoi ? Le vide. L'incompréhension. La terreur. La colère.
ERROR SYSTEM.* * * * * * *
« Orhan ? Orhaan, tu es réveillé .! Orhan ? »Lentement ses orbes s'étaient ouvertes à nouveau sur ce monde. Les jours avaient défilé lentement, longuement. Quatre jours en réalité alors que, blessé et seul, une seconde équipe de traqueur l'avait retrouvé perdu au milieu de la forêt. Errant seul, ses orbes vitreux avaient affolé la seule femme qui osait s'approcher de lui sans sourciller. Élise.
« Orhan, c'est moi, Élise ! Comment te sens-tu ? »Les questions s'enchaînaient rapidement, ne laissant guère le temps à l'homme de retrouver ses moyens. Les souvenirs revenaient, reprenant leur droit sur l'inconscient qui avait persisté jusque-là, mais bientôt ils s'arrêtaient. Net. Plus rien. Le néant à nouveau.
« Je... Je ne me souviens de rien... »* * * * * * *
Le choc, une chute un peu trop violente, un traumatisme. Toutes les raisons possibles et inimaginables avaient été envisagées concernant cette perte de mémoire soudaine, pourtant le blonde s'y refusait. Ça ne pouvait être aussi simple et ce visage qui le hantait. Cette forme informe qui le bouffait. Cette phrase et ce visage incertain. Ils étaient liés sans être la même personne. Si l'homme avait toujours eu cette aura d'une assurance hors normes, d'une confiance en soi à toute épreuve, elle se brisait l'espace de quelques mois, laissant la crinière blonde dans le vague. Perdu.
Les souvenirs ne voulaient revenir d'eux-mêmes et aucune des pistes possibles ne semblaient convenir. Alors pourtant interdit de le faire, Orhan avait essayé. Aussi bien des sorts pour retrouver son bien que des potions, mais cette barrière le bloquait. Cette barrière invisible qui brimait les méandres de son esprit. Ça ne pouvait être que de la magie également.
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« Hein... Tu vas quitter le ministère ? Pourquoi ?! »Il n'y avait plus rien pour lui là-bas et cette seule quête de la vérité le rongeait, affublée par cette colère d'avoir été roulé, d'avoir été privé de ce qui lui appartenait de droit. Cette seule pensée le rongeait chaque jour au point d'en oublier ce que l'enfant avait pu rêver de faire un jour. Vingt-cinq ans et bouffés par une quête probablement vaine de poursuivre dès le départ. C'est la fierté cependant qui prenait le pas.
« Je dois retrouver ce qui m'appartient. »C'est ainsi que son chemin s'était séparé de cet institut.
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Des recherches. Encore et toujours. Des recherches si longues que cela en devenait lassant, fatiguant, épuisant, mais cette détermination, cette colère, cette fierté le bouffait, l'obligeant à continuer. Qui pouvait avoir le pouvoir de lui retirer une partie de sa mémoire ? Un bref instant qui, sans savoir pourquoi, lui semblait si important. Probablement son souvenir le plus important à vrai dire. L'homme en était infiniment persuadé sans comprendre.
Presque une année avait alors filé rapidement, trouvant finalement une réponse plus que plausible : un légilimen. Les livres lui en apprirent plus, se jugeant intérieurement de n'y avoir pas songé plus tôt. C'est alors à ses vingt-cinq ans toujours que la bête blessé, féroce s'était retrouvé à endurer le calvaire d’acquérir un don qui n'était pas inné chez lui : Celui de devenir un légilimen à son tour. Par instinct de survie, par protection, par peur également. Pour connaître la vérité, il fallait retrouver ce visage qui le hantait. Les traits incertains qui perlaient dans ses souvenirs flous, avant ceux oubliés. Il ne restait que cette phrase et ce visage. Et c'est ce visage que l'homme chercherait inlassablement jusqu'à la fin de son existence. La rencontre se ferait un jour cependant, Orhan s'en faisait la promesse. Pour remédier à cette défaite écrasante, pour calmer cette rancœur qui le rongeait lentement, son chemin avait croisé celui de son
« maître » quelques jours plus tard.
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Six années de calvaire on fait de lui, un légilimen. Non sans être le meilleur dans ce domaine, loin de là, l'ancien Serpentard avait acquis rapidement les bases, essayant encore à ce jour de les perfectionner pour devenir assez bon pour extraire des souvenirs à son tour. Néanmoins, ne pouvant se permettre de passer trop de temps uniquement sur le sujet de la légilimencie, l'homme avait continué sa quête jusqu'à retourner à Poudlard un peu poussé par le destin. Parce qu'inconsciemment, la crinière dorée songeait que revenir aux sources pouvait être le déclencheur de tout ce qui avait suivi par la suite.
Ainsi Orhan avait fait son entrée à l'école à vingt-neuf ans en tant que professeur de soins aux créatures magiques, continuant cependant à se perfectionner dans son « don » dès que le temps libre se faisait sentir.
Aujourd'hui encore, l'homme est dévoré par cette vengeance, par ce seul instant oublié.
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« Orhan c'est ça ? Je suis George, j'espère qu'on fera de grandes choses ensembles ! Si t'as envie de pleurer un jour, tu peux venir me voir. »
J'ai besoin de savoir ce qui est arrivé ce jour-là. J'ai besoin de savoir où t'es passé, enfoiré !