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 somewhere only we know (aymeric)

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Hibou
Deborah Bolton


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Feat : original de Pippa McManus

Double Compte : Duduke et Rosavipère

Deborah Bolton





somewhere only we know (aymeric)
04.09.16 23:09



 


“They who dream by day are cognizant of many things which escape those who dream only by night” E. Allan Poe

C’était un grand carré de verdure idéal, un champ avec l’herbe aplatie par endroit, après qu’un gros animal soit passé par là, des citrouilles parsemaient ici et là le paysage d'un goût avancé d'Automne, muni encore de quelques fleurs sauvages caressant chatoyant l’air d’un lancer de pétales ; le chaud mouvement de l’air qui battait sa bouche, s’insinuait sous le voile léger d’une petite robe bleue délavée et marquée par le vert du pré, en dessous encore un fin chemisier blanc tombant sur ses coudes. C’était les herbes hautes et presque sauvages qui se confondaient avec le ciel bleu, devant, à perte de vue, derrière, et sur les côtés aussi, de sorte que là, au milieu de nulle part, Deborah avait la sensation étrange d’être au centre du monde, c’était l’immensité d’une étendue campagnarde boudée par l’homme et sa passion pour les lieux domestiqués.
De fait, le pré n'était pas si imposant, on distinguait encore derrière les hautes tours du château. De fait, il n'était pas non plus si isolé. Mais Deborah aimait penser le lieu comme une distension de l'espace,  puisqu'elle préférait l'infini et l'inépuisable au huit clos et aux intimités trop oppressantes, trop renfermées, trop malsaines.

La respiration un peu courte, le souffle irrégulier soulevait avec une lenteur difficile sa cage thoracique. C'était la vie qui s'écoulait mollement du bout de ses lèvres charnues, c'était ses soupirs étouffés qui mouraient instantanément mélangés au pollen, c'était la tiédeur d'un léger vent qui frappait sa bouche d'un interdit. C'était l'ouverture trop faible des lippes gorgées de soleil, la gorge trop sèche, le caprice d'un besoin, d'une soif. Petite plante qu'on aurait laissé se déshydrater depuis trop longtemps maintenant, croyant peut-être réussir à vivre de photosynthèse.

Elle gonfla les joues, chaudes comme le soleil cuisait sa chair ; elle se laissa encore aller dans cet alanguissement. Il lui semblait qu’on avait transformé le ciel en un vaste diaporama où les nuages défilaient lentement et dont la course ne s’interrompait vraiment que par la brusque apparition d’un oiseau, d’un insecte voltigeant dans l’air.
A ce moment, il lui parut absolument nécessaire et évident qu’elle ne ferait rien. Elle se sentit vide, mais non pas de ce vide angoissant, d'une lacune, ou bien d'un manque, non c'était le vide rassurant de quelqu'un qui se sentait bien trop bien. Deborah se sentait gâtée, de quelques sourires estivaux, de quelques fleurs enroulées autour de ses petits doigts, de quelques caresses de rayons miroitant dans la chevelure si brune. C'était l'instant béat, celui qui n'attendait rien de plus que la succession d'expirations trop basses et trop faibles, comme des murmures grimpant jusqu'aux extrémités du ciel, puis mourant.

L'après-midi ne s'écoule pas, elle stagne sous le soleil, c'est le temps qui prend sa pause. Une joue rabattue contre une mèche de cheveux, elle-même fondue avec la terre, les odeurs du champ se dégageaient doucement du sol, s'imprégnaient de son corps de petite femme. Elle avait le même parfum que les fleurs sauvages, que la mauvaise herbe aussi, fort étrange, pur aussi. Une abeille la confondit, se posa sur le bout de son nez, les sens éveillés ; la senteur des lilas, ce devait être ça. L'instant se suspendit encore. La nature parfois se montrait cruelle. Un geste trop vif et ce serait le dard. Les yeux louchèrent sur la robe jaune et brune. Sa main glissa avec une extrême précaution sur l'herbe, parcourut la couverture d'un grimoire abandonné, chercha une baguette qui avait néanmoins roulé trop loin.

_ Oh !  

L'étonnée raisonna à peine, quoique cela fut le seul son vraiment, au milieu des bruissements évidents de la nature.
Elle ferma les yeux, ses doigts se tripotant entre eux dans ce doux embêtement, ce trouble léger en elle que provoquait la soudaine arrivée d’un indésirable sur le bout de son nez. Elle était alerte, Deborah, vous savez. Elle n’avait pas entendu seulement le bourdonnement de l’abeille, mais aussi le tremblement de la terre, le bruit que font les herbes lorsqu’elles se couchent, comme un ridicule sifflement, étroit, presque inaudible, une fente d’air. Des pas de plus en plus proches, de plus en plus grondants dans la sérénité de l’instant, et tout semblait se décupler lorsqu’on se rendait ainsi, lorsqu’on se donnait à la terre. C’était un séisme.
Si Deborah s’était redressée elle aurait su alors que ce n’était rien, rien qu’une nouvelle existence qui s’avançait droit sur elle, se heurterait probablement à la sienne, elle aurait vu que ce n’était pas si lourd, pas si effrayant, que la silhouette se serait dessinée, dressée dans la lumière du jour. Elle attendit néanmoins avec cette patience qui lui était propre, cette attente rêveuse, et sans regarder, les sensations paraissaient se décupler. Et tous ces petits bruits d’ordinaire inaudibles, d’ordinaire insignifiants raisonnaient de mille feux dans ses tympans, d’artifices, semblables à une fête, chant, bourdonnement, vent, odeurs, senteurs, dans un élan éclaté de la nature.

L’ombre avala sa peau, la lumière disparut derrière l’éclipse ; c’était là. L'abeille avait fui. Vu du sol cela paraissait si grand, si imposant. Deux pieds bien ancrés, à quelques centimètres seulement de sa tête, et puis le reste qui s’étendait et s’étendait dans le ciel. Cela aurait pu être un arbre. Mais un arbre ne marchait pas. Une petite auréole dessinée par le soleil au-dessus, et elle imagina alors que l’étranger venait de très loin. Elle le regarda, et lui aussi la regarda. Alors ils se regardèrent un instant, sans se connaître tout à fait, se devinant juste. Et elle n'avait pas eu peur, n'avait même pas eu ce regard timide. Juste, de la candeur du bout de ses longs cils, l’œil bleu figé dans le sien, un peu ébloui mais toujours très calme, alors Deborah semblait toujours attendre, dans l'air immobile. Un mot pour rompre l'équilibre.


(c) naehra.

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Re: somewhere only we know (aymeric)
08.09.16 19:01



Somewhere Only We Know
 

Une main était passée sur son menton et son regard, lassé, s’était désolidarisé du manuel entre les lignes duquel il avait été, tout au long de la dernière heure, immergé. L’attention l’avait alors salué bien bas et s’en été allée sans demander son reste, amie d’un jour, ennemie de l’autre. Filament qu’il était si facile d’égarer. Aymeric n’était pas un être des plus pensifs mais, de nature, l’esprit humain est si volatile… Cela le fit sourire.

Il avait nonchalamment refermé l’ouvrage, qui lui avait opposé une étrange et vaine résistance, comme pour le rappeler à ses devoirs, avait étiré ses épaules en liant ses mains derrière le dossier de sa chaise. Ce faisant, ses yeux s’étaient égarés au-dehors, aussitôt perchés sur la cime des pins qui, bordant le parc du château de leurs hautes et majestueuses silhouettes, effleuraient également l’horizon. Audacieux mirage qui au ciel, portait affront.

Et puisque le temps s’y prêtait, puisqu’il pouvait se le permettre, puisqu’il prendrait scrupuleusement garde aux abeilles et aux guêpes, il s’était sciemment laissé tenter par une courte excursion. Il s’était alors penché en avant, aplatissant une longue main sur le bois frais de la table, et s’y était appuyé pour se lever. Il avait prestement rangé sa chaise, abandonné le manuel sur l’étagère adéquate et s’en était, lui aussi, allé, une main dans une poche de son pantalon et la démarche tranquille, quasiment lymphatique.

Dans les couloirs, il fit un bout de chemin en compagnie de quelques connaissances, regrettant qu’Arcturius, son acolyte, ne soit pas d’entre eux. Encore d’intéressantes discussions qui se perdaient. Il échangea tout de même avec ses camarades des banalités sur le temps, sur les cours, sur l’instant… Tout sauf ces sujets qui fâchent, tout sauf les récents évènements qui, à deux d’entre eux, avaient ôté la vie. Il finit par bifurquer à l’entrée du château, tandis que les autres prenaient la direction du parc. Aymeric les salua, prétextant qu’il avait à faire ailleurs. Puis il entreprit de contourner l’immense bâtisse et de dénicher quelque sentier perdu, peu enclin à arpenter de long en large les jardins du château, trop petits, trop vite découverts à ses yeux. Un chemin, a priori, on n’en connaissait pas la fin. Ne pas voir le bout des choses, voilà qui était grisant.

Le jeune homme retroussa périlleusement les manches de sa chemise un peu froissée; le soleil n’avait, loin de l’abri des arbres, rien de clément. Ses pas le menèrent sur le sentier rocailleux qui, derrière le château, conduisait à la cabane du garde-chasse. Et un instant, il pensa à sa sœur. Il pensa à Victoria parce que c’était le genre de chemins sur lesquels se jetait leur dévolu lorsqu’ils partaient en randonnée. Parce qu’envers et contre tout, malgré ses dix-huit années révolues, malgré ce lourd sac-à-dos qui auraient enserré ses frêles épaules, Victoria aurait enchaîné pirouettes sur pirouettes, exténuante, inquiétante et tout aussi ravissante. Encore un sourire que les occurrences, les souvenirs et les pensées dessinèrent sur les lèvres d’Aymeric. Celui-ci descendit calmement, ses épaules entraînées par le mouvement de ses jambes, les marches rocheuses que le temps avait ébauchées, que la nature avait matérialisées, que les pas des jeunes sorciers, au cours des âges, avaient forgées.

Bientôt, les premières citrouilles fleurissaient aux côtés de ses pieds, offrant fièrement leurs éclatantes couleurs au promeneur, au milieu des denses et hautes herbes sacrifiées au vent tiède. Parmi ces dernières également, une silhouette féminine étendue sur le sol, qu’il ne remarqua que juste à temps. Il n’eut pas le temps d’identifier cette dernière, car une abeille s’en élevant vint le menacer de son vol ivre de nectar. Aymeric suspendit ses pas ainsi que son souffle, alerte, tandis que l’adrénaline riait, insolente compagne de toujours, à son cœur, à ses oreilles. Qu’il était agaçant, tout de même, d’avoir autant à craindre un être si insignifiant.

L’insecte s’éloigna enfin et après quelques secondes supplémentaires de paralysie inquiète et interdite, Aymeric put souffler librement et reprendre sa marche, un peu moins enjoué que tantôt, cependant. C’était Deborah Bolton qui était allongée dans l’herbe, ses jolies prunelles assaillies par le soleil, la peau rosie par la chaleur. Aymeric s’arrêta à côté de son visage, ni au-devant, ni à l’arrière, peut-être un peu trop près. Elle ne semblait pas l’avoir reconnu, parce que lorsqu’elle le reconnaissait, il lui trouvait ce regard empreint de plus de douceur que de timidité.

« Deborah. » La salua-t-il cependant avec un sourire de circonstance; peut-être le reconnaîtrait-elle à sa voix ?

Il releva le visage, les yeux perdus un peu plus loni, la posture hésitante, en suspend, un peu courbée, toujours une main dans une poche puisqu’il ne savait pas qu’en faire, la mâchoire un peu contractée, inconsciemment. Et en accordant à nouveau son regard accompagné d'un sourire à la jeune femme, Aymeric se décida à s’asseoir, parce que le candide rictus de Deborah était obligeant, avenant, parce qu’il semblait lui dire que l’herbe ici était douce, l’air chargé d’effluves estivales, le soleil miséricordieux, le parfum des fleurs, mêlé comme les eaux d’un ruisseau au sien, sa présence féminine. Parce qu’il y avait dans son regard, et le long de son corps gracile, un quelque chose qui charmait inexorablement, quelque chose de presque affriolant. Et quelque chose d’autre encore, comme si le monde avait une toute autre apparence - bien plus enchanteresse - à ses yeux, à sa place. Et il n’y avait rien d’embarrassant dans ce fade silence qu’ils avaient coutume de cultiver, tandis que, un avant-bras sur un genou, l’autre jambe étendu, il prenait place, assis, dans l’herbe aux côtés de Deborah.

« Comment vas-tu ? » S’enquit-il cependant, sans vraiment être inquiété, d’une voix un peu trop grave, peut-être un peu hésitante.

Pour une entrée en la matière, il n’y avait rien de plus banal. Mais là encore, il n’y avait rien de plus banal que l’amitié que partageaient Deborah et Aymeric. Un statu quo, une immobilité dont ni l’un ni l’autre se plaignait. Une amitié que beaucoup trouveraient lassante, trop ténue, trop fluette, trop conforme. Oui, Deborah était intrigante, Aymeric se contentait de ce charmant mystère, l’observait de loin, sans le toucher, sans s’en formaliser. C’était très bien comme cela.
+ ft.Deborah
+ hrpj'espère que ça convient ehehehe
BY MITZI
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Hibou
Deborah Bolton


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Deborah Bolton





Re: somewhere only we know (aymeric)
08.09.16 23:03



 


“They who dream by day are cognizant of many things which escape those who dream only by night” E. Allan Poe

Alors il y avait eu de la magie, la magie de sa voix à lui qui avait tiré de ses lèvres un sourire trop grand, trop ravi, trop doux, de cette assurance certaine, de cette identité qu’elle reconnaissait soudain. Car il n’y avait pas d’hésitation à avoir, à ressentir, parce qu’il s’agissait de la voix d’Aymeric, et parce que dans cette évidence, malgré le soleil capricieux qui continuait de se refléter dans le bleu fragile de ses yeux, malgré tout oui, elle croyait dès à présent reconnaître ses traits. Elle croyait à cette apparition donnée, elle croyait à ce formidable hasard, et elle se persuadait alors qu’elle n’aurait pas aimé que cela ne soit pas Aymeric, si l’instant avait été à refaire puisqu’elle était sûre maintenant que seul Aymeric lui aurait provoqué cette satisfaction, comme s’il venait abruptement de la combler par sa simple présence, par son simple lui. Car sil n’avait pas été question d’Aymeric, peut-être alors son sourire n’aurait pas été aussi créatif, aussi beau.

Elle avait fermé les yeux une fois qu’elle avait senti sa masse si proche d’elle, plus près, plus bas dans son champ de vision. Et même ses paupières closes auraient donné l’impression d’un rire, car il y avait cette béatitude presque naïve. Comment n’aurait-elle pas pu se sentir si bien, dans cette relation si simple et si facile.

Il y avait la solitude parfois, au milieu de cette immensité champêtre, il y avait Deborah qui trouvait naturellement sa place auprès des éléments, sa beauté bucolique un peu rare, cet assoupissement, ces vies dans lesquelles elle ne faisait que se promener, d’une galerie à l’autre, d’un artiste à un autre. Deborah était une touriste, la touriste qui s’égarait dans les lieux trop connus, trop délaissés parfois, dans ces existences qui ne restaient somme toute jamais trop importantes. En vrai, elle tournait un peu en rond, semblait ne pas s’en rendre compte, revenait toujours au même point, étendue au milieu d’une étendue. Et il y avait Aymeric, Aymeric qui surgissait si bien, toujours de la meilleure des manières, Aymeric qu’elle n’aurait jamais mis à la porte de son univers, Aymeric qu’elle entendait et écoutait comme elle aimait écouter les bruits, les effusions de la nature chantante ; puisqu’Aymeric était devenu une force, un décor, un élément de son paysage. Elle n’avait pas eu à l’accepter, à s’habituer à lui, car il s’était intégré naturellement, car il ne lui avait rien demandé, lui avait cependant peut-être donné un peu plus de joie, un peu plus d’ivresse, une petite cuillère de bonheur dans une existence qu’elle menait déjà bien, qui la ravissait, l’émerveillait.

_ Je vais mal ! Alors elle avait ri à sa question, et la réponse lui était venue spontanément. Très très mal Aymeric ! Mais ce n’était pas vrai, et comment cela aurait-il pu être vrai alors qu’elle souriait en s’en décrocher la mâchoire, alors qu’elle se délectait même de sa présence, alors que les bras écartés au-dessus de sa tête, le corps déposé là, toute détendue, toute vibrante, de vie, de chaleur, de douceur, de plaisir. Alors qu’elle était si ouverte, au ciel, à une brise légère sur son visage, tellement innocente, tellement pure, tellement vierge de tout tracas. Car les sigmas étaient bien loin de son petit coin de verdure, à des années lumière de sa galaxie. Elle rayonnait. Elle rayonnait dans cette ignorance du monde, de ce qui l’entourait. Elle se révélait alors, à Aymeric, qui n’aurait eu qu’à se pencher pour la cueillir.

Deborah aurait souhaité s'oublier là, dans l'instant. Alors le réconfort d'une fin d'été, d'un début d'automne, de quelques chauds degrés l'avaient saisie de nouveau dans cette torpeur, dans ce calme, dans cet halo de chaleur et de sécurité. Ici on soignait les créatures, on ne les blessait pas. « Ici, je n’ai pas peur et je me sens bien. » et cela avait échappé de ses lèvres, presque murmuré, car elle ne se sentait bien que dans cet isolement de verdure, dans le monde un peu sauvage, loin de la folie des Hommes et de leurs sorcelleries.

_ Montre moi ton visage, Aymeric. Et elle avait soulevé ses paupières. Du doux, un peu de mélancolie aussi. Et elle avait tendu un bras en l'air, le dos de sa main avait effleuré la figure du garçon. C'était bien lui. Le contact aurait duré quelques secondes non nécessaires. Elle se serait oubliée là aussi. Il y avait de la banalité dans leurs échanges, de l'irréfléchie aussi, quelque chose qui ne demandait aucun effort, quelque chose qui ne demandait qu'à exister. C'était cela qui faisait qu'elle se sentait si bien avec Aymeric, et qui lui donnait l'impression d'être réconfortée. Et puis il y avait eu cette idée qu'elle ne voulait pas qu'il s'en aille, obsédante. Elle se décida à le lui dire, un peu égoïste. « Tu devrais rester ici, toi aussi. »

Alors son bras était mollement retombé, tandis que son regard n'avait pas cessé de le couver.
Puis alors sans vraiment qu'on ne s'y attende, tout son corps avait basculé, s'était penché vers le sien, longeant la jambe étendue du garçon. Son visage avait à moitié tenté de disparaître, une joue dissimulée contre la cuisse. Sa ballerine avait gentiment caressé le bout de sa chaussure.

_ Tu es mon ami, et je m'occuperai bien de toi, parce que je prends toujours soin de mes amis.


(c) naehra.

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Re: somewhere only we know (aymeric)
11.09.16 21:05



Somewhere Only We Know
 
Et, comme elle l’avait affirmé avec une verve qui était toute sienne, Deborah avait très certainement l’air d’aller mal. Aymeric l’écouta rire, ses propres yeux rieurs, eux aussi, auditeur secrètement enchanté par ces éclats cristallins, promptement désarçonné par ces charmes vraisemblablement innocents, par cette vaporeuse aménité. Lui aussi, si l’on en croyait les termes et l’état de la jeune femme, allait très mal, dans cet éden champêtre, un peu naïf et insouciant. Et ses propos étaient irréfutables; les craintes et les préoccupations auxquelles elle faisait allusion n’y avaient pas leur place.

Il y avait quelque chose de réconfortant dans cela, quelque chose qui courait allègrement entre les brins d’herbe, sur le suave épiderme de Deborah, quelque chose qui se logeait contre la gorge ce cette dernière, au creux de laquelle Aymeric aurait, quelque part, aimé à enfouir son visage déjà chauffé par le soleil. Quelque chose dont il pensait que même l'étroitesse, la faible viabilité, ne suffisaient à attrister. Quelque chose aussi, contre la peau de sa main qui, sur le tranchant de sa mâchoire, laissa son empreinte tactile, sans qu’il n’en sache vraiment si elle était fraîche ou bien moite. Et puis le bras gracile de Deborah retomba doucement, escorté d’une profusion d’effluves, de parfums de fleurs et d’herbes fléchies par leurs deux corps. Alors Aymeric regretta subrepticement que l’effleurement ait été si court, qu’il n’ait été, justement, qu’effleurement.

Il détourna pourtant le regard, peut-être à regret, pâle imitation de ces ressorts résistants parce que rouillés, rictus dont on ne savait s’il était plutôt enjoué, défaitiste ou embarrassé.

« Je reste, je reste ! » souffla-t-il d’un ton qu’il voulait taquin « Puisque tu me le demandes. »

À d’autres, ce dernier propos, un peu plus graves, avait tous les airs d’un drapeau blanc et désireux de mettre fin à de tendres hostilités contre lesquelles il était on ne peut plus désarmé; une résistance n’était décemment pas envisageable, alors, dans un rare élan de hardiesse, il s’avouait vaincu. Il frotta le bas de son visage contre l’intérieur de son bras tendu, le regard, dans les arbres perdu, comme si ce geste était à même d’étouffer ce dernier aveu maladroit. Mais alors, ne serait-il pas resté quand bien même ne le lui aurait-elle pas proposé ?

Il fut interrompu par une petite pression contre sa cuisse et par un faible froissement par-delà le grondement du textile de sa chemise contre sa peau. Un nez pointu puis une joue ronde et câline. Alors Aymeric se dit qu’il fallait bien, pour que leurs esprits soient si volatiles et saturés, que l’endroit ait sur eux quelque effet désorientant. Dans un équilibre périlleux, il posa une main un peu égarée, sans regarder, sur le crâne brûlant de la jeune femme.

« Eh ben, qu’est-ce qui t’arrive ?» fit-il, à la fois cajoleur et goguenard.

Son regard s’attarda, s’emmêla dans ces cheveux bruns, qu’il ébouriffa doucement, comme pour se défaire de la précédente maladroite immobilité de ses doigts, de cet étourdi engouement que l’on adopte de temps en temps, afin de feindre une certaine maîtrise et aisance dans quelque occurence incommode.

« Te fais pas de bile pour moi, va ! »

Et il retira sa main, avec emphase, de son sourire un brin gêné, avant de s’allonger lui aussi, glissant pour placer le sommer de son crâne contre les côtes de la jeune femme. Un bras pour appuyer sa tête, il leva l’autre, armé de sa baguette pour chasser à plusieurs reprises une guêpe qui, un peu trop insistante, répandait ses bourdonnements sur leurs alentours. Et dans leur petit havre d’insouciance, que seuls des insectes de cette trempe venaient troubler, il s’était dit que les SIGMAs étaient bien lointains, que le château, quand bien même on en apercevait le sommet des tours, aurait bien pu s’écrouler, qu’ils n’auraient pu être dérangés. Parce que, envers et contre tout, la vie continuait, l’insouciance avait encore lieu d’être, la respiration de Deborah continuerait à effleurer ses cheveux, l’herbe continuerait de plier au vent. Et, contre l’herbe, il leva le visage en direction de la jeune femme, sans pour autant distinguer le sien. Il s'empara néanmoins de son poignet qui gisait là et, de son pouce, appuya doucement sur la veine qui coulait, telle un ruisseau, sous sa peau blanche.

« Merci, moi aussi je prendrai soin de toi, Deborah. »

Ces mots sonnaient un peu étrangement à ses propres oreilles et il espérait tout de même n’avoir jamais à la protéger de quoi que ce soit.
+ ft.Deborah
+ hrpencore désolée pour le retard ! ♥
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Re: somewhere only we know (aymeric)
11.09.16 23:55



 


“They who dream by day are cognizant of many things which escape those who dream only by night” E. Allan Poe



_ Mais rien. Je profite de l’instant… Et de toi.  
Elle avait l'oeil coquin, le sourire taquin en réponse à son ton qui ne lui avait pas échappé, qui lui aurait arraché un rire encore. Puisqu'elle le lui avait demandé. Et Deborah ne s'en cachait pas après tout, de ce contentement au final plutôt simpliste qui lui avait étreint doucement la gorge, avait serti ses joues d'une chaleur qui ne venait pas simplement des rayons, mais bel et bien d'un soulagement. Quoiqu'elle n'avait pas douté, qu'il resterait. Cependant l'entendre le lui dire, le lui confirmer, l'avait empli d'aise. Sa figure avait baigné dans l'allégresse, y demeurait encore. Deborah songea une fois encore, qu'ils étaient bien. Et si elle profitait de lui, cela devait effectivement être le cas. Il y avait eu sa main dans ses cheveux, ses doigts courant dans ses mèches, dérangeant une coiffure qu'elle n'avait pas tant recherché, mais qu'elle avait volontiers laissé faire, les yeux se fermant une fois de plus, éteignant un instant la lumière du jour pour mieux ressentir. Deborah aimait les touchers, Deborah aimait les contacts faciles, aimait les caresses audacieuses, la tendresse brusque, celle qu'on n'espérait pas, qu'on n'attendait pas, qu'on ne savait même pas être désirée. Il lui semblait avoir attendu toute l'après-midi pour cet instant, ce vague moment où un autre être humain l'avait fait se sentir bien, l'avait fait un instant se sentir, aimé ? Non. Cela devait être un mot trop fort. Cajoler. Elle se sentait cajolée. Et au delà de la chaleur chatoyante prodiguée par la nature, par la lumière, c'était celle qu'elle sentait coulée en elle, avec Aymeric, grâce à Aymeric, qu'elle préférait.

Les paupières toujours closes, le sourire toujours éclatant, elle avait menti, du tac au tac. Mais je ne m'inquiète pas pour toi. Doucement, gentiment. Car si elle avait dû avoir peur pour quelqu'un, le premier pour lequel elle aurait tremblé, cela aurait certainement été lui. Allons, les personnes qu'elle affectionnait autant se faisaient si rares. Elle n'avait pas seulement de la sympathie, pour cet Aymeric, elle avait de l'adoration, de l'amour, de la joie, un goût d'infini. Elle n'aurait cependant pas prétendu être si proche, ou simplement le comprendre, et quoique, si elle l'avait dit, cela n'aurait pas été vrai. Dans le fond, leur amitié touchait du doigt le superficiel par leur banalité. Cependant, la tendresse qu'elle ressentait pour Aymeric, sans se l'expliquer, avait tout de sincère, tout d'authentique, tout de spontané. Et lorsque ses regards se posaient sur sa frimousse, c'était toujours avec cette attention bienveillante, cet attachement presque chuchoté. Il lui semblait, à Deborah que l'affection n'avait pas besoin de se connaître, dêtre une habituée. Elle existait. Pure et merveilleuse. Elle ne connaissait pas Aymeric, pas aussi bien peut-être qu'elle l'aurait intérieurement souhaité, cependant cela ne l'aurait pas empêché de tant l'adorer.

Et elle avait rouvert ses yeux juste pour voir sa tête contre elle, là, un peu plus bas, pour l'accueillir d'un sourire. Elle n'en avait pas été dérangé, n'aurait pu l'être, comme elle l'acceptait si bien auprès d'elle, comme cela lui semblait même nécessaire. Puis, tournant une fois de plus son visage vers le bleu du ciel, sa main libre entreprit d'arracher quelques fleurs sauvages, tandis que son poignet trouvait tout naturellement sa place sous les doigts d'Aymeric. Elle se laissa faire encore, sembla ne pas tout à fait se rendre compte de cette nouvelle liberté qu'ils s'octroyaient, de cette proximité dont ils n'auraient peut-être pas eu l'habitude. Mais cela lui aurait paru naturel sur l'instant.

_ Est-ce que tu as peur des abeilles ?

Demanda-t-elle innocemment, comme elle voyait le bout de sa baguette s'agiter dans les airs, sans moquerie aucune, juste par curiosité. Le goût d'en savoir plus. Car Aymeric tout entier lui apparaissait digne d'intérêt, de ses passions, de ses troubles les plus embarrassants aussi. Cela ne l'aurait pas dérangé de tout savoir.

Il avait dit qu'il la protégerait, alors cela l'avait un peu émue, l'avait un peu plus contentée. Et elle se sentait déjà si bien, que cela lui paraissait vraisemblablement étrange de se sentir mieux encore. Une petite fleur entre deux doigts, elle tendit sa main vers le garçon encore, glissa doucement la plante derrière son oreille, parut satisfaite du résultat, partit d'un rire un peu bref.

_ Prendre soin de moi ? Mais Aymeric, tu le fais déjà. Tu ne peux pas faire plus, alors que tu fais déjà tant.

La voix un peu basse, la bouche entrouverte, Deborah songea. N'était-il pas après tout en train de lui tenir compagnie, elle qui se sentait parfois si seule, sauf lorsqu'il était là, sauf lorsqu'il faisait si bien valoir sa présence qu'il en serait presque devenu indispensable. Lui qui ne donnait pas l'impression de la juger, lui qui savait la mettre à l'aise, lui qui savait lui faire penser qu'un peu, pas longtemps, juste le temps d'être là, elle pouvait être importante, lui qui lui offrait toutes ces petites choses, le contact, l'intérêt, que les autres ne lui donnaient pas.

_ Heureusement que tu es là, personne d'autre ici ne pense à moi. Alors pour te remercier, je ne vais penser qu'à toi !

Elle avait rit encore.
Deborah riait beaucoup. Les éclats ne duraient jamais, surprenaient par leur spontanéité, même brefs. Et cela témoignait de sa félicité, de ses douceurs. Sans s'en douter, elle avait cette fraîcheur pour apaiser les âmes et les coeurs. Elle ne serait pas parvenue à ne songer qu'à lui bien sûr, comme elle avait ses pensées trop nombreuses, trop égarées, comme elle ne savait pas, pas encore du moins, tout donner de sa personne à un seul et unique être. Un jour peut-être le saurait-elle. Mais elle voulait bien tout de même faire de son mieux, pour Aymeric. Alors ça avait été son tour de laisser serpenter ses petites et étroites phalanges dans ses cheveux, le bras reposé sur son ventre, sans ébouriffer, mais de cette lenteur qu'elle avait parfois, de cette petite caresse machinale qui ne lui demandait pas tant d'effort, pas tant d'attention, qui l'aurait même au contraire fait se détendre. Et son poignet toujours sous sa main, elle avait réfléchi oui, à ce qu'elle aurait apporté à Aymeric, car il lui apportait déjà tant, soudain, qu'elle aurait aimé à son tour oui, qu'il profite un peu d'elle comme elle profitait déjà de lui.

_ Car moi, je ne fais pas grand chose pour toi, en retour. Cela ne va pas. Que voudrais-tu de moi, Aymeric ?


(c) naehra.

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Re: somewhere only we know (aymeric)
14.09.16 0:30



Somewhere Only We Know
 
La fleur contre son oreille le chatouilla désagréablement ce qui ne l’empêcha pas de sourire, de ce passif et pacifique sourire qu’on lui connaissait bien, un peu étourdi par le soleil, un peu somnolent. Le geste était attendrissant et, en guise de remerciement, il exerça de petites pressions intermittentes sur les tendons du frêle poignet de la jeune femme. Il remonta ensuite le long de la mince articulation, entoura sans mal cette dernière de son index et de son pouce pour enfin appuyer ce dernier contre la paume de sa main.

« Tu exagères, je ne fais pas tant que ça » fit-il en reprenant son sérieux.

Et, de son pouce il dessinait de petits cercles sur cette peau, un peu de ceux qui habitaient l’eau, un peu de cette mappemonde miniature striée de petites failles qui, sur cette aire rosée, tressaillaient d’un pouls gracile et apaisé.

 « Et puis c’est dans l’ordre des choses non ? Je suis ton ami aussi après tout. »

Sa compagnie n’était pas désagréable, qui plus était. Et ce n’étaient pas là de ces attentions que l’on distribuait au compte-gouttes, par peur de paraître trop attaché, par peur de se lasser. Non, il n’y avait là aucune lassitude qui tenait. Il n’y avait pas là de don de soi exagéré. Il n’y avait que l’insouciance, que le goût d’une liberté à la fois désinvolte et étourdie, que le fardeau d’un soleil peut-être un peu trop insistant. Il n’y avait qu’elle, il n’y avait que lui. À s’entendre ériger comme le seul habitant des pensées de Deborah, la chaleur sembla se faire plus harassante au bout de ses oreilles, et il feignit gauchement de déloger une poussière de sa chemise pour ne pas avoir à relever. Parce que ces propos semblaient hors du temps - et en même temps si adéquats, si évidents ici-bas - et que, oui, quelque part ils avaient dérangé son esprit tantôt assuré. Parce que ce n’était pas des choses que ses oreilles, d’ordinaire, entendaient. Il n’y avait alors eu que ce rire léger et maintenant familier pour le désembarrasser.

« Tu ne me dois rien, Deborah; fais simplement attention à toi. »

Et cela lui semblait si naturel, que les négociations, que les contreparties, que les concessions n’aient pas lieu d’être dans cette amitié, si naturel que la question de Deborah l’avait surpris, peut-être un peu piqué, peut-être un peu refroidi aussi. Sa mâchoire probablement se crispa-t-elle un brin et il délaissa, vaincu derechef, le poignet de la jeune femme, l’abandonnant aux touffes d’herbe. La main, véritable bohème de chaire, dans ses cheveux faisait contrepoids, parce qu’aucun scrupule ne pouvait résister à cela. L’instant le berçait. Et s’il s’était, en première instance, demandé ce qui avait bien pu porter Deborah à s’allonger ici, la réponse lui semblait désormais évidente, vaste peut-être, de telle sorte que les mots ne s’y prêtaient pas, mais pas moins évidente.

Aymeric sans doute n’était-il pas aussi perméable aux charmes de la nature que ne semblait l’être Deborah, si bien que ç'avait été elle avant tout qui l’avait arrêté et qui le retenait ici. Il ne savait laquelle de la respiration de la jeune femme derrière sa tête, ou de celle de la clairière environnante, donnait le la à l’autre. Il n’avait aucune idée de l’heure présente, ne se souciait guère de si le ciel était à même ou non de l’informer. Non, ce n’étaient pas là de ces incertitudes qui agacent, qui impatientent, qui détournent de ce qui épanouit. Il s’agissait de ces mêmes incertitudes qui le firent se glisser cette fois-ci aux côtés de la jeune femme. Ces incertitudes qui le rendaient un peu satellite, un peu aimant, un peu abeille - envers et contre tout. Ces mêmes incertitudes qui lui rappelaient son étrange statut de corps étranger dans cette clairière qui semblait pourtant l’assimiler, fermant ses yeux émeraudes sur ses maladresses. Épaule contre épaule, et c’était là une attache, comme l’avaient été les côtes de la jeune femme, sa main dans ses cheveux, son poignet. C’était un peu se rapprocher, aussi, de ce que la jeune fille pouvait voir; sans la même teneur, sans la même humble richesse, sans la même légère densité que l’on connaissait à ce regard azur, cependant. En se redressant il délogea la fleur qui, miraculeusement, avait tenu derrière son oreille, et la déposa sur le front de la jeune femme. Et comme elle ne disait rien et qu’il fallait bien opposer concurrence aux bourdonnements des abeilles et aux murmures des feuilles, il s’empara une fois de plus de la main de la jeune femme et la posa sur le dos contre ses propres yeux, en guise de protection face aux traîtres rayons solaires, avant de demander, espiègle:

« Dis-moi ce que tu vois. »

Le ton avait été pressant, peut-être un peu étranger à lui-même. Peut-être était-ce là une tentative de se prêter au jeu de la jeune femme, d’alléger ses propos précédents, qui auraient pu sonner comme on ne sait quelle menace étrange. Ses yeux à lui n’avaient alors vu que le ciel, il n’empêchait qu’il était curieux de ce que pourrait bien lui raconter la jeune femme. Et sous sa main, il avait souri.
+ ft.Deborah
+ hrpaaaah je crains que ce soit un peu weird weird sur la fin /^\ Mais enfin, Aymeric est un genre de weirdo, right ? heheh
BY MITZI
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Deborah Bolton


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Re: somewhere only we know (aymeric)
15.09.16 21:45



 


“They who dream by day are cognizant of many things which escape those who dream only by night” E. Allan Poe



Exagérait-elle ? Oui, elle le devait sans doute. Elle exagérait toujours, surtout lorsqu’elle se sentait bien, surtout lorsque le monde lui semblait si beau. Et Aymeric colorait le monde bien plus encore que ce qu’elle ne voyait déjà. Deborah aurait dit alors que lorsqu’on aimait, il était bien normal d’exagérer, que cela même ne devait pas être retenu. C’était ainsi. Elle se retrouvait dans ces excès débordants, et il n’y avait rien vraiment qu’elle ne pensait pas suffisamment, comme elle jetait proprement son amour, presque négligemment, mais avec cette sincérité qui ne faisait pas semblant, ne se berçait pas d’illusions. Elle affectionnait, et l’affection la rendait reconnaissante, reconnaissante d‘avoir quelqu’un à même d’affectionner. Alors son sourire était resté simple, comme elle n’aurait cependant pas pris la peine de l’expliquer ; certaines choses malgré tout devaient rester secrètes. Il ne pouvait pas savoir Aymeric que ce qui semblait être si peu était en réalité beaucoup. Deborah aimait faire des versants des choses, de ses sentiments exaltés, de ses petits bonheurs tout délicats, tout fragiles, tout amoindris, mais qu’elle transformait en bouquets.

Le tracé de son pouce sur la paume de sa main l’apaisait. Elle s’oubliait dans ce doux effleurement, et la caresse lui remontait jusqu’à ses pommettes, saillantes.

Et si. Si elle voulait lui devoir des choses, elle désirait surtout être utile. Car il y avait parfois ces incertitudes un peu insolentes dans son esprit si libre, des pensées touristes qui survenaient abruptement sans jamais rester trop longtemps, disparaissaient même avant qu’on s’aperçoive de leur présence. C’était ainsi. Lorsqu’elle pensait à Aymeric, il lui arrivait de se demander si ce qu’ils étaient devait lui suffire, si cette non prétention, cette pure amitié qu’ils ne vouaient à rien, qu’à la légèreté des instants où ils pouvaient aimer être ensemble, se suffire l’un l’autre, si cela oui pourrait se poursuivre dans cette innocence ; l’innocence de ce qu’ils se figuraient. Elle aurait voulu qu’Aymeric ne se lasse pas, elle aurait voulu qu’Aymeric lui retrouve toujours un intérêt. Le réclamait seulement. Bien sûr elle ferait attention à elle, car elle avait appris à se protéger, et peut-être se protégeait-elle juste trop, peut-être aurait-elle voulu lui dire, non c’est trop tard tu as déjà promis de le faire. Mais elle s’était tue. Car elle sentit sans doute cette mince, imperceptible et futile distance, presque rien mais pourtant, pourtant ses doigts avaient lâché son poignet. L’épiderme respirait seulement, libre, mais Deborah aurait cru plutôt qu’il était en train d’attraper froid.

_ Ce n’est pas que je te dois quelque chose, mais tu comprends Aymeric, moi j’aime quand tu es là, mais je ne sais pas comment te le dire.

Et ne venait-elle pas de le faire, sans même s’en rendre compte ? Et cela avait sonné comme une banalité, mais si touchante, si vraie. Mais elle avait continué, ne s’était pas arrêtée sur ses mots. Ses jambes repliées, les tissus capricieux de sa robe qui voulaient remonter à tout prix, juste un peu au-dessus de ses genoux, elle n'y prêtait pas d'intérêt. Car d'autres auraient dit qu'une fille, ça ne devait pas se tenir ainsi, avec si peu d'attention, trop de latitude, pas assez de rigueur. Car son épaule contre celle d’Aymeric, il y avait ce laisser aller innocent, un abandon, dans ses gestes un peu trop libérés, dans cette oisiveté.

_ Je vois une infinité de choses, Aymeric.

Elle s’était un peu retournée, de profil, appuyée contre lui, un coude dans l’herbe, tout en gardant sa main sur les yeux du garçon. Et de la fleur qu’elle avait récupérée sur son front, d’une main chatouilleuse elle avait doucement esquinté les pétales sur l’épiderme d’Aymeric, sur ses joues, dans son cou.

_ Ecoute le silence, les vibrations de la terre. Est-ce que tu ne sens pas cette senteur, les fleurs en chaîne, l’odeur de l’herbe tout contre ta peau. Est-ce que tu sais qu’il y a de la beauté juste tout autour de toi, que la nature toute entière est comme un poème. Je vois des couleurs criardes, du bleu du jaune du lumineux du orange du vert du blanc du rouge. Et c’est comme un océan de teintes parfumées, mais personne n’y fait jamais attention. Alors tu comprends, c’est comme si c’était rien qu’à moi.

Et sur cette remarque, ses doigts avaient délaissé la fleur, s’étaient retrouvés sur les joues du garçon encore, de manière plus marquée cependant que la fois précédente, avaient balayé sa figure de nouvelles dorloteries, et sa voix enjôlée, ce sourire qu’il ne pouvait pas voir elle avait poursuivi, la voix plus basse pour l’obliger à prêter l’oreille, pour ne plus déranger. Et c'était étrange que pour dire ce qui lui paraissait être le plus important, elle se confondait en murmures, comme si l'essentiel réellement aurait été trop précieux à voix haute, comme si un vent léger, une bourrasque avaient pu soudain tout emporter et ne rien laisser.

_ Et tu es là, Aymeric. Et c’est tout aussi bien, voir mieux. Toi aussi, tu es une merveille de l’environnement. C’est comme si tu avais toujours été là. C’est comme si c’était normal que tu sois là. Alors je vois le soleil qui réchauffe ta peau. C'est tout chaud et tout agréable. Je vois ton visage aussi, dans son entièreté, mais surtout il y a ton sourire. Et c’est ça que je préfère et que je choisis de voir.

Alors doucement, elle avait à son tour retirer la main qui empêchait le jeune homme de voir, car elle n'aurait pu le priver trop longtemps de ces belles choses à son tour, et comme elle avait le visage penché juste au-dessus de lui, elle avait eu cet énième sourire, celui qu'on ne comptait plus, celui qui demeurait toujours, du haut de ses lèvres charnues. Et on aurait dit que c'était bien ce que sa bouche faisait de mieux, comme elle dessinait des éclosions de fleurs à chaque ouverture, entre un petit mordillement envieux d'une commissure.
Elle s'allongea une fois de plus, sur le ventre cette fois-ci, ses bras repliés devant elle, le menton reposant sur le dos d'une main. Ses jambes faisaient des allers retours dans le ciel, s'élevaient pour battre de l'air avant de retomber aplatir une fois de plus la zone où l'herbe se couchait déjà.

_ Et toi, dis-moi ce que tu vois.

Car elle était curieuse de ce qui attirait l'attention d'Aymeric, de ce qu'il jugeait peut-être digne de sa vue, de son intérêt. Elle voulait connaître la vision qu'il possédait, la sienne propre, celle qu'elle ne connaissait peut-être pas. Elle rêva, un peu. Pour le plaisir encore, elle prononça son nom, de ses lèvres chantantes, de ses sourires affriolants, de cette espièglerie.

_ Aymeric. Aymeric Carthew. Donne moi un petit aperçu de ton monde.


(c) naehra.

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Re: somewhere only we know (aymeric)

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