Ouch, I have lost myself again - [Solo]

Elle tourne. Se retourne. Ferme les yeux une seconde et les rouvrent, cherchant le sommeil, l’attendant, mais ne le voyant toujours pas venir la rejoindre.
Elle sait que même s’il venait, elle ne dormirait pas paisiblement. Les cauchemars auraient probablement jailli dans la nuit. Elle s’y attendait. Pourtant, rien n’y avait fait. Elle avait recommencé. Comme à chaque fois.

Elle se redressait et s’asseyait au bord de son lit. La sueur perlait sur son front, dans sa nuque, même ses mains semblaient moites. Ces dernières, d’ailleurs, venaient rabattre en arrière la crinière rousse de Siobhan dont quelques mèches étaient resté collé au contact de sa peau humide.

Fiévreuse. Nerveuse. Fatiguée. Frissonnante.

La jeune femme n’avait pas l’air dans son état normal. Elle savait pourquoi. Mais elle continuait de supporter la souffrance. Elle en avait eu assez. Comme à chaque fois.

Elle se levait finalement du matelas, silencieusement, ne voulant pas alerter ses camarades, enfilant sa robe de chambre et récupérant sa baguette avant de descendre les marches pour rejoindre la salle commune des Gryffondors. Elle utilisa un Lumos à mi-chemin, une fois certaine que la lumière ne dérangerait aucun élève. Elle se souciait bien moins de leur sommeil que de la discrétion dont elle devait faire preuve pour ne pas susciter des interrogations sur son état.
Quelques pas encore et la voilà trônant au centre de la salle vide et silencieuse, avec pour seul guide l’étincelle qui brillait à l’extrémité de sa baguette.

Quelques pas qui, pourtant, avaient été un calvaire. Se tenant à chaque mur, chaque objet traînant sur son passage pour ne pas tomber. L’équilibre dont elle était garante habituellement était bien loin, tout comme ses forces qui semblaient avoir pris congé de ses muscles.

Et maintenant debout, seule, tenant à peine debout en plein milieu de la pièce, en plein milieu de la nuit, en plein milieu d’une autre de ces crises qu’elle connaissait si bien.

Elle savait ce qui allait se passer en arrêtant son traitement. Elle le savait, mais, comme a chaque fois, elle avait voulu essayer de s’en passer. Et, comme à chaque fois, elle ne le supportait pas. Un traitement moldus, bien sûr. Des antidépresseurs, tout ce qu’il y a de plus commun dans le monde des non-sorciers. Le seul traitement à sa portée, son entourage magique ne connaissant rien du mal qui la rongeait jour après jour. Sauf que ce traitement, qui l’aidait à repousser l’obscurité de ses pensées, l’avait surtout enfermé dans ce souvenir auquel elle tentait d’échapper. Pas celui de sa soeur, non. Celui de sa faiblesse. Celui de sa culpabilité.
Chaque comprimé qu’elle prenait été comme une piqûre de rappel quotidienne et douloureuse.

Alors, une nouvelle fois, Siobhan tentait de se défaire des liens qui l’emprisonnaient et qui, contrairement aux autres souffrances qu’elle s’infligeait directement ou indirectement, ne l’aidait pas à se sentir en vie, bien au contraire.

Une nouvelle poussée de fièvre ne tardait pas à la faire vaciller, l’obligeant à se tenir à une table proche de sa position. Puis les nausées se joignaient à la fête.

Siobhan étouffait, elle devait sortir, elle savait où aller, comme à chaque fois.

Sortant du dortoir le pas rapide et malgré sa démarche chancelante, elle longeait maintenant le mur, suivant une trajectoire visiblement bien trop souvent empruntée.

C’est ainsi que son périple l’amena jusqu’au large balcon de l’étage, lui offrant une vue dont elle ne se souciait guère. Elle s’agrippa à la rambarde et inspira longuement, emplissant ses poumons de la pureté salvatrice dont elle avait besoin, faisant cesser lentement le mal qui l’avait mené là. Pourtant, son corps commençait à l’abandonner malgré ce regain de force apporté par la fraîcheur revigorante. Sans possibilité de le réprimer, elle se laissait finalement glisser le long de la grille métallique qui la séparait du vide, se retrouvant rapidement sur le sol glacial.

Les mains toujours scellées à la barrière, elle posa son front contre son bras, fermant les yeux et oubliant le froid mordant qui lui donnait une raison de plus de frissonner. Oubliant tout et ne pouvant plus faire qu'une seule chose.

Pleurer.

Elle tentait de tenir. Elle essayait. Elle luttait. Mais la douleur se propageait en elle. La douleur physique d’abord, puis les pensées chaotiques. Les larmes perlaient sur ses joues en flot continue, comme si celui-ci ne s’arrêterait jamais. Elle ne bougea pas durant de longues minutes, se laissant aller à la tristesse pour une fois, ne se cachant pas, puisqu’elle n’avait à se cacher d’aucun regard cette fois.

C’est à ce moment qu’elle décida d’abandonner.

Elle pointa sa baguette vers l'intérieur du château, vaguement dans la direction du dortoir et prononça un accio afin de faire venir jusqu’à elle son traitement, qu’elle s’empressa de prendre pour lui permettre de retrouver son carcan chimique le plus rapidement possible.

Comme à chaque fois.