❝ the dominoes fall; Moira

Le choc de ton corps qui heurte un arbre créé par mère Nature. Tu ressens des craquements dans ta faible ossature. Ton visage se crispe dans un faciès débordant d’amertume et de révolte. Moira semblait vouloir que tu l’écoutes, attentivement cette fois. Si bien que plaqué à ce grand chêne, les frissons qui te parcouraient de la tête au pied ne pouvait que te garder les yeux écarquillés et l’esprit attentionné. Elle n’avait pas eu l’air d’apprécier ton baiser et de l’accueillir comme une aide bienveillante et précieuse. Décidément, soit tu emboîtais tous les faux pas, soit Moira ne comprenait pas un mot de ce que tu insinuais. Tu aimais bien parler avec nuances, faire des sous-entendus, pousser les autres à prendre conscience par eux mêmes. Mais ils se braquaient comme des brebis agressées, prenant tout personnellement sans avoir une once de recul dans leur misérable vie. Misérabilisme et nombrilisme, voilà ce que tu retiendras de la belle Moira, ce soir. En espérant que ça change… pour elle. Pour eux.

—  “Moira.” Ta voix est douce cette fois, lente mais ferme. Bienveillante mais autoritaire. Tes yeux trahissent une inexpression oppressante. “Le forcing, ça marche pas. Tu peux pas forcer quelqu’un à t’aimer et l’accuser de t’avoir transformé en déchet s’il ne te donne pas ce que tu désires.”  

C’est tout ce que tu diras sur ce sujet. Elle aura ton avis, elle en fera ce qu’elle voudra. Aie. Ses mains qui n’avaient rien de féminin te plaquèrent à nouveau contre l’arbre, puis un doigt se posa sur tes lèvres, te frustrant de ne pouvoir répliquer à cette attaque cinglante. Elle semblait vouloir que tu l’écoutes. Attentivement. Son index sentait la nicotine, mélangé à cette fragrance brûlée qui se baladait dans l’air, l’ambiance olfactive de cette scène te donnait presque la nausée.

Pour la première fois depuis la soirée, elle aborda un sujet assez sensible te concernant. C’était inédit qu’elle balance des punchlines réfléchies et intelligentes. Si tu faisais souffrir Alice ? Si tu y pensais ? Evidemment, c’était même la raison de cette ambiguïté constante. Tu faisais constamment un pas vers elle, puis deux en arrière. Tu reculais lentement, lui donnant l’illusion de te rapprocher. Mais son visage commençait légèrement à se flouter à l’horizon. Tu fermes les yeux, tu vois ce corps frêle qui te tend les bras. Mais tu ne les prends pas. Car tu risquerais de briser ce corps de porcelaine, cette poupée parfaite aux mille défauts, tu risques de l’abîmer.

— “J’en suis conscient. Tu ne crois pas que je fais déjà ce qu’il faut ? Je m’éloigne. Lentement. J’essaye de la préserver de tous le mal que je pourrais lui faire.” tu te râcles la gorge, hésitant à dire ce que tu avais dans le fond de ta pensée. “Et tu ne penses pas que Vega en a conscience aussi ? Tu ne veux plus souffrir, mais tu ne veux pas le laisser s’éloigner de toi. Parce que c’est une drogue, tu le veux tellement que tu préférerais t’arracher les ongles un par un plutôt que d’accepter les faits.” Tu soupires. C’est infâme, tu le conçois. Un cercle vicieux qui se nourrit du désespoir pour continuer à rouler.

—  “Je jure que je la protégerais. Même si ça inclut de l’éloigner de moi.” Ton visage pâlit à cette idée, mais tu t’y es résigné. Car cette boule de nerfs d’Alice risque d’exploser, à force de s’accrocher, et elle détruira tout sur son passage. C’est ta mission Arcturus, de faire en sorte qu’elle reste le rayon de soleil qu’elle est. Même si elle doit briller dans son coin, t’illuminer de loin.
Elle te tend la main à nouveau. Tu hésites mais tu l’attrapes. Deviens ami avec ton ennemi qu’ils disent. Moira n’est pas ton ennemi non.. c’est juste une étoile déchu, qui s’est amouraché du soleil. Mais à trop s’en approcher, on s’en brûle les ailes. Et l’étoile Moira est perdu, elle cherche son chemin et un sens à sa vie. Elle est comme toi Moira.
Dans une certaine mesure.

—  “Je vais retourner au dortoir, il est tard. Ce n’est pas que je me suis lassé de ta sale tête de dépressive mais si tu pouvais me lâcher.” Tu l’écartes et passe devant elle, un oeil glacial la scrutant toujours avant d’ajouter.
—  “Fais attention à toi Moira. Ne fais rien de stupide, ou tu le regretteras.” Cela valait pour tout. Ne fais rien de stupide avec Vega. Ne te détruis pas. Ne fais rien de stupide avec Alice. Ou c’est moi qui te piétinerait.