add a little more of paint until the world's set right ♦ kieran

Je déteste les examens. C'est un truc que j'ai du mal à gérer. Je m'en inquiète que la veille, ou trois heurs avant d'entrer dans la salle. La panique me prend et j'ai très envie de me jeter par une fenêtre ou de courir partout en hurlant. Mais on m'a bien élevé alors je me contente de mourir dans mon coin d'angoisse jusqu'à ce que sonne le glas du début d'examen. Faut que j'apprenne à canaliser ce stresse où je vais en crever un jour. Les BUSEs, on joue quand même notre avenir, y 'a de quoi sacrément stresser. J'en dors difficilement, plus que d'habitude, et pourtant, d'ordinaire, mes nuits sont nettement raccourcis par les insomnies qui me prennent un peu trop souvent. Il faut que je dorme, que je ferme les yeux et que je laisse le sommeil m'emporter dans les bras de Morphée. Les minutes passent, je me tourne dans mon lit. Une fois. Deux fois. Le bruit de mes soupirs et de mes draps froissés finit par irriter mes voisins de chambre. En temps normal ils supportent assez bien mes agitations nocturnes, mais eux aussi ont des examens à passer. Il est préférable que je traîne ailleurs pour le reste de la soirée, du moins jusqu'à ce que je me sente sur le point de m'effondrer.

Toujours en pyjama, je prend mon sac rapidement pour disparaître dans la salle commune. Quelques âmes désespérées éraient encore ci et là, révisant les derniers chapitres de leur prochain examen. Une ambiance chargé de tension de et d'angoisse. C'est comme si un nuage noir planait au-dessus de la pièce. Étouffant. Tout était soudainement étouffant et le manque de fenêtre à proximité me fait suffoquer. C'était pas le moment d'avoir une crise de panique. Pas le moment du tout. Me fallait de l'air. Je prend les jambes à mon cou et je me tire de la salle commune sans écouter ce que le préfet me dis. Reste que dix minutes avant le couvre-feu. M'en faut que cinq pour faire l'aller retour jusqu'au balcon, ou aux fenêtre, ou n'importe où d'assez grand et lumineux. Arrivé dans le couloir, je sens déjà cette angoisse se libérer de ma poitrine. Un soulagement silencieux. Je respire un peu mieux mais j'avais vraiment besoin de m'aérer l'esprit.

Les couloirs sont calmes. J'entend les pas de quelques retardataires qui se pressent jusqu'à leurs salle commune. Deux Serdaigles. Machinalement mon regard se porte sur le bout du couloir pour y chercher un visage familier avant de se rappeler que tout le monde devait déjà se trouver dans les dortoir. Y'a pas beaucoup d'idiots qui arpentent les couloirs dans des moments pareils. J'ai pris l'habitude d'être seul dans ces moments-là, quoi que je tombe parfois sur quelques surprises. C'est aussi pour ça que je me rend sur le balcon, la dernière fois je n'étais pas resté seul très longtemps. J'entend du bruit par delà les grandes arches et presse le pas, souriant stupidement en déboulant comme une fusée sur le balcon et me retrouver face à une tête blonde penchée au-dessus de ce qui semblait être un tableau encore inachevé.

« Oh.. désolé.. »

Planté là en face de lui, j'en étire un sourire pour masquer la gêne et cette légère déception. Je ne sais pas tellement à quoi je m'attendais, mais finalement j'avais quand même la compagnie que j'espérais. Gryffondor, plus âgé, Sören était souvent en train de peindre. Seul, avec ses pinceaux, ses toiles et le reste. Je crois que les gens le trouvaient un peu bizarre, ou pas tellement accueillant, c'est vrai que des fois il n'avait pas l'air super abordable mais, dans le fond il était adorable. Ma curiosité me pousse à glisser un oeil sur ce qu'il était en train de dessiner, forcé de constater qu'il était doué, comme d'hab. Moi si j'ai jamais vraiment dépassé le stade des bonhommes en bâtons..

« Encore tout seul hein ? Je te dérange pas au moins ? C'est quoi que tu fais ?  »

Il ne me remarque pas. Du moins pas tout de suite. Les artiste ont cette capacité impressionnante à occulté tout ce qui se trouve autour d'eux quand ils se plongent dans leurs créations. Je serai passé devant lui vêtu d'un tutu rose et chevauchant une licorne qu'il n'aurait probablement pas relevé la tête. J'étire un sourire à cette idée, le laissant enfin prendre conscience de ma présence en croisant mon regard. Un moment de flottement plus tard, il ouvre la bouche pour me saluer sobrement et me laisse approcher. Visiblement je ne le dérange pas même si je viens juste de brise sa solitude. Parfois les gens ont simplement besoin d'être seul, mais c'est plus fort que moi, j'ai ce besoin constant de venir les titiller. Comme attiré par je ne sais quelle force, ou c'est simplement ma propre angoisse de la solitude qui me pousse à toujours venir tenir compagnie aux âmes solitaires. Sören en était une. Il l'est un peu moins quand je suis avec lui et cette simple idée me satisfait.

Un sourire de plus pour un dernier regard au dessin qu'il me tend. Je crois que je ne l'aurais pas imaginé appréciant les fleurs. Pourtant, avec du recule ça lui va plutôt bien. Sören, seul, entouré de fleurs, un crayon à la main. C'est assorti à son calme et à sa discrétion. Le contraire de moi en quelque sorte. Je me pose dans un soupir non loin de lui et étire mes membres endoloris jusqu'à craquer mes os. Ce que je faisais là ?

« Moi je cherche le sommeil. Des fois qu'il se soit caché dans les couloirs, on sait jamais.. Mais je peux aussi attendre ici qu'il se décide à se montrer. C'est carrément une bonne idée. Enfin Si tu veux bien. Faut pas avoir peur de me dégager, j'suis genre hyper collant... »

Un rire idiot m'échappe. Les gens ont souvent du mal avec ma tendance de stalkeur. A croire que je suis la seule personne sur tête capable d'une telle aisance avec le monde qui l'entour. Pas l'ombre d'une gêne ! Je reste là jusqu'à ce qu'on me demande de partir, et encore. Des fois je reste quand même.

« Mais bon en même temps tu squattes mon spot alors j'ai le droit de te stalker un peu... d'ailleurs.. hum... T'as pas croisé de préfets par hasard ? »

Machinalement mes yeux se portent sur le balcon pour en scruter les moindres recoins. C'est à croire que je m'attendais à voir surgir quelqu'un de derrière la rambarde. Tout est possible ici.

Pas de préfets. Déçus ou satisfais, j'avoue que j'ai du mal à me décider. Mais peut être que c'est préférable de ne pas en croiser pour le moment. Je ne sais pas quelle heure il est mais, les dix minutes de répits que le préfet des rouges m'a donné doivent s'être écoulées depuis longtemps. Peut être que quelqu'un allait venir nous déloger du balcon. Lux, ou je ne sais qui. Mais j'ai l'espoir de croire qu'on sera tranquille encore quelques temps, parce que je suis loin d'avoir trouvé le sommeil encore et rôder dans la salle commune comme un lion en cage ne me semble pas être la meilleure solution. Et puis ici, il y'a Sören. On a jamais vraiment pris le temps de parler. Je crois qu'il n'est pas très bavard, ni même très sociable, quoi qu'il l'est un peu plus quand on prend la peine de l'aborder. Comme moi. Assis sur le banc, le corps avachi et les mains tapant mes genoux au rythme d'une musique silencieuse, mes yeux se reportent sur lui au moment même ou il me demande de ne pas bouger.
Pas bouger pendant vingt minutes.

« Heu... sérieux ? »

Ouais. Ça a l'air en tout cas. Tourné vers lui, je le vois déjà dessiner sur sa feuille, relevant le nez de temps en temps pour me regarder. Visiblement je suis devenu son nouveau modèle. C'est flatteur mais je suis pas dans la meilleure position possible pour rester immobile. Et si j'ai envie de me gratter le nez. ? Comment je fais ? Voilà.. j'y pense.. du coup j'ai le nez qui me démange. C'est horrible. Mais il a l'air concentré et je crois que je m'en voudrais de gâcher son plaisir. Ou juste son tableau.

«  Je vais essayer alors. Mais la position est bien là ? Faudrait pas que tu dessines une demie larve avachis sur un banc. Ce serait dommage... pour une fois que je sers de modèle  en plus.. tu dessines souvent des gens ? »

Je ne bouge pas malgré tout. Essayant même de ne pas respirer trop fort ou trop vite. Rester immobile si longtemps c'était difficile. Surtout pour moi. Et surtout quand on me le demande en faite. Á croire que tout mon corps se met soudainement d'accord pour me démanger un peu partout ou se mettre à vouloir s'agiter. Et ça me gratte toujours le nez en plus..

J'ai encore jamais servie de modèle. Ça fout un peu la pression mais je me prêt au jeu. Je suis certain que ça rendra bien, les quelques fois où je stalke Sören dans ses séances de griffonnage, le résultat est toujours super. Peut être même qu'il me le donnera. Je pourrais frimer en racontant à qui veux l'entendre que je suis tellement cool maintenant qu'on va accrocher mon tableau dans la salle commune. Personne va y croire mais ça les fera beaucoup rire je suis certain. Finalement il me libère de ma torture mentale et de ce grattement de nez insupportable. Je soupir de soulagement en venant frotter frénétiquement le dessus de mon nez dans un sourire ravie.

« Mince, pourquoi c'est quand faut pas bouger que ça commence à te gratter partout. C'est insupportable... mais du coup t'as quand même finit ? »

Curieux, pour pas changer, je jette un œil au dessin sur lequel il se penche. J'y distingue clairement la forme d'un visage, du mien en fait. Quelques mèches de cheveux se tracent sous son crayon. Une contemplation silencieuse simplement rythmé par le bruit du fusain sur le papier. Le regarder dessiner a quelque chose d'apaisant. Ce calme et ce silence, pour une fois je m'y habitue, j'ose à peine l'interrompre un peu trop concentré sur ce qu'il crée sous mes yeux.

Finalement, après quelques minutes de contemplation, je lui lâche un sourire en m'avachissant une fois de plus sur la table. Un coude sur la table pour soutenir ma tête.

« J'crois que même si je m'entraîne toute ma vie j'arriverais jamais à faire aussi bien que ça.  Tu dessines beaucoup trop bien.. mais j'imagine qu'on te le dit genre... trente fois par jour ?»

Parce que c'est le genre de truc évident, le genre de remarque qu'on sort à chaque fois qu'on voit quelqu'un faire quelque chose de talentueux. Á force il devait se lasser, même si c'est sincère. Puis certaines personnes sont mal à l'aise avec les compliments, je ne connais pas assez Soren pour savoir s'il est de gens là. C'est peut-être le moment de le découvrir.

Il semble apprécier le silence. Parfois il ne suffit qu'un peu de calme et une présence amicale pour se sentir comblé. Je ne veux pas briser cet instant. Je le laisse se perdre dans son œuvre autant qu'il le désir. De toute manière j'aime cette tranquillité et m'en contente encore quelques instants jusqu'à ne plus retenir mon enthousiasme. Il a l'air un peu étonné du compliment. Comme quoi j'ai vu juste en m'imaginant le garçon mal à l'aise avec ces derniers. Mais disons plutôt qu'on ne lui en accordait pas tant que ça. Comme si le monde se fichait de son talent. De ses créations. J'avais du mal à y croire mais quelque part ça ressemblait bien aux gens. Passer à coté des autres sans les remarquer et sans même leurs porter un regard. Des fois je me dis que je suis le seul à prendre cette peine et à sourire au monde. C'est sincèrement dommage. Au moins avec le mien ça en fait déjà un. Plus que vingt-neuf à trouver pour demain!

« Je suis certain que beaucoup pensent comme moi mais te le disent pas. Les gens sont timides ou coincés. Ou les deux mais là c'est des cas désespérés. »

Parce que ce genre de personnes existent et qu'il fallait vraiment les aider à s'ouvrir au monde. Une vraie croisade. Mais je suis content d'en être un des soldats ! J'aime m'imaginer que j'ai un réel impacte sur les gens et leurs relations. Pas par vanité ou par égoïsme. Non. Simplement parce que j'aime l'idée qu'ils se sentent plus à l'aise. Avec ou sans mon aide d'ailleurs. Un peu comme Sören à cet instant. Il sourit peut être un peu plus que d'habitude. Ou alors je me fais des idées mais dans le fond c'est pas si important.

Il poursuit son dessin et passe ensuite aux vêtements. Le même silence s'installe encore une fois. Une fois de plus il n'a rien de gênant ou de pesant. Il est simplement serin. Pour une fois ce n'est pas moi qui brise le moment mais bien lui. Sa question reste une seconde en suspens. En réalité c'est peut être un peu vexant. Du moins ce le serait pour n'importe qui d'à peu prés normal. Heureusement que j'étais bizarre.

« Quoi ? Pour de vrais ? »

Il ne plaisantait pas non. En fait il avait même l'air très sérieux ce qui me fait rire une seconde en me redressant un peu pour lui faire correctement face. Les yeux dans les yeux. Peut être qu'il s'en souviendra comme ça.

« Kieran. Alors... tu te souviens pas de moi pas vrais ? »

J'étire un sourire en croisant les bras sur la table. Moi je me souvenais parfaitement de lui par conte. Mais je me souviens de beaucoup de choses en réalité et surtout des gens. Les gens comme lui qui débarquent quand on ne s'y attend pas et qui se montrent simplement gentil ou serviable. Il avait juste l'air d'avoir carrément oublié.

Le pauvre a l'air vraiment gêné de ne pas me reconnaître. C'est pourtant pas si grave, à vrais dire je crois que c'est plutôt normal. Ça fait un moment maintenant que cette « rencontre » avait eu lieux. Ce n'était simplement pas aussi marquant pour lui que pour moi. De plus, je suis le genre de personne qui accorde beaucoup d'impotence aux gens qui l'entourent. Beaucoup sont étonnés que je retienne leurs nom ou même quelques anecdotes. Quand les gens brillent, même juste un peu, on a du mal à les oublier. Comme les étoiles filantes. Elles scintillent, elles captent notre attention le temps d'un sourire et rendent cet instant un plus beau. Presque unique, puis elles disparaissent dans la nuit noire, n'en laissant qu'un souvenir agréable. Sören est de ces étoiles.

Le nez sur son dessin, il semble tout de même curieux de savoir pourquoi je me souvenais de lui alors qu'il peinait à mettre un nom sur mon visage. Une seconde me suffit pour rassembler mes souvenirs. Étrangement, je m'en souviens comme si c'était hier.

« Bah.. c'était y'a quelques temps déjà. En fait c'était pendant ma première année. Un soir où j'étais avec Tommy. Enfin, mon copain de l'époque. Il était un peu tard et on se disait bonne nuit avant qu'il descende pour retourner dans sa salle commune.. Et puis là, y'a ces mecs qu'on débarqué, je crois que c'était des dernières années.. ou pas loin.. enfin.. Ils ont commencé à nous emmerder.. tu vois le genre quoi... et là.. t'as débarqué de je sais pas ou... Genre, le héros qui sort de l'ombre pour foutre la branlé aux méchants.. je sais plus exactement ce que tu leur a dit, mais en tout cas ça les a carrément calmé et ils se sont cassés. »

J'en étire un autre sourire, me permet même un rire en me redressant vaguement sur ma chaise. C'est bizarre de parler de ça après tout ce temps. Je crois que je me suis naïvement imaginé qu'on oublit pas quelque chose comme ça. Faut croire que non.. du coup, je me sens un peu idiot d'en parler comme si c'était un truc héroïque et digne de tous les intérêts du monde. Gêné, mon regard se perd une seconde vers l'horizon tandis que je triturais machinalement mes doigts.

« Tu trouves ça idiot que j'en souvienne après tout ce temps nan ? En faite, c'est peut être ma faute si tu te souviens pas de moi.. Si j'étais venue te remercier après ce que t'avais fait, peut être que tu te serais souvenu de mon nom. Surtout que sur le coup on avait quand même un peu flippé.. »

Maintenant on pouvait en rire. Mais sur l'instant, se retrouver coincé avec deux types de cinq ans nos aînés, visiblement hostile et loin de tout regard. Ça n'avait clairement rien de rassurant.