suck it and see ♔ elenore

L'eau coulant sur ton corps, tu poses le front sur le mur en carrelage, les bras le long du corps, la mine déconfite. Ça n'avait pas été le meilleur entrainement de ta vie, ça c'est sûr. Pour toi il se résumait à éviter les obstacles, voler très vite, attraper le vif d'or. Tout ça tu sais le faire, d'habitude. Mais aujourd'hui, sans doute moins en forme, tu n'as pas su esquiver le cognard correctement. Ce dernier t'as frôlé de justesse, et tu as fini suspendue à ton balais sans trop savoir comment, n'y remontant que difficilement à la force de tes bras, grognant. Alors t'es là, contre le carrelage gelé, l'eau brûlante ruisselant sur ta peau. Tu décides quand même de te dépêcher, histoire de rentrer rapidement te reposer. Ouch. Demain tu auras des courbatures aux épaules.

Les cheveux enroulés dans une serviette, tu es seule lorsque tu arrives dans les vestiaires, du moins, de ton côté. Tu fouilles dans ton casier machinalement, sans réfléchir, t'enfiles un débardeur large et confortable, une chose que tu aimes porter après le sport. La jupe, la ceinture, la chemise ouverte un peu froissée, bref, tout l'uniforme sauf les collants, car tu as encore beaucoup trop chaud après ta douche. Tu jettes un rapide coup d’œil à droite car tu crois discerner un mouvement. Et puis tu freezes. T'arrêtes même de respirer. Des mecs à poils t'en a vu plein, surtout tes potes. Et encore là tu ne vois que son dos, rien d'autre. Sauf que c'est Hermès. Ton sang ne fait qu'un tour et tu te cache furtivement derrière ton casier, presque gênée. Puis tu fronces les sourcils. Gênée? Toi? T'en a plus que marre de réagir comme une gamine qui croise son idole lorsque tu le vois. Tu ne peux cependant pas t'en empêcher. Dès que tu le sais dans les parages tes mouvements se font plus gracieux, plus souples, et tu as ce sourire discret constamment sur tes lèvres. Tu sens ton cœur s'affoler, alors tu te donnes un coup sur la poitrine, tel un bonhomme des plus virils. Hermès, tu le connais, c'est ton ami, pas de raison de s'affoler. Discrètement, tu regardes à nouveau. Toujours de dos, il enfile son t-shirt et cache son tatouage que tu as rarement eu l'occasion de voir. Déçue, tu fais un peu la moue, mais tu te reprends.

Tu enlèves la serviette trempée de tes cheveux et les laisse détachés dans ton dos à sécher, tant pis s'il sont encore humides, de toute façon tu t'en fous toujours un peu. Tu fais quelques pas vers ton ami, le rouge montant aux joues. Tu sursautes même légèrement quand il prononces ton prénom.

▬ « Coucou! » Tu fais les derniers pas qui vous séparent pour arriver à son niveau, lui souriant. « Ça s'est bien passé pour toi l'entrainement? »

Heureusement que par dessus tout, tu n'es pas non plus du genre à bégayer. T'es juste devant lui, détendue, tranquille. Ça te fait du bien de le voir un peu, toi qui n'était pas au top de ta forme jusqu'à maintenant.

Un sourire espiègle habille ton visage après sa petite pique que tu ne prends pas mal, au contraire.
Et puis ton sourire disparaît et tu ouvres des yeux ronds, surprise par sa question. En fait, tu l'as déjà entendue, mais c'est justement parce qu'on te l'a déjà posée que ça te surprend. Ca se voit tellement, que tu es épuisée? Et en plus, tu ne savais pas Hermès  si observateur. Alors, forcément, ça te fait un peu plaisir, tu ne caches pas le fin sourire qui étire à nouveau tes lèvres, plus timidement cette fois.

▬ « Tu as l'oeil, très cher.» Tu souffles.

Balançant tes pieds d'avant en arrière, les mains dans les poches de ta jupe, tu penches légèrement la tête sur le côté, comme agacée par ce que tu vas lui dire. Mais bon, c'est toi qui l'a choisi, cet apprentissage.

▬ « Je n'ai pas vraiment... de soucis, mais disons que je ne dors plus beaucoup depuis quelques semaines. »Les yeux fuyant, tu fixes la poignée du casier derrière Hermès. «  J'ai commencé l'apprentissage pour devenir Animagus et c'est assez... épuisant. »

Au moment où tu prononces ce dernier mot tes yeux viennent se planter dans ceux d'Hermès. Sans vraiment le savoir, tu viens y chercher de la compassion, du réconfort. Juste un peu de chaleur. Tu ne l'as avoué à personne, peut-être même pas encore entièrement à toi-même, mais quand tu te sens vraiment mal après une nuit particulièrement éprouvante, il n'y a plus qu'un endroit où tu rêverais d'être ; et c'est au creux des bras de ton très cher « ami ». Et tu le sais, que c'est terriblement kitsh et sucré, tu ris toujours un peu quand c'est les autres qui parlent d'amour de cette façon... mais bon au fond de toi, t'es un peu une romantique inavouée, qui ne changera jamais. Tu finis par baisser la tête, gênée de maintenir son regard si longtemps. Tu sens tes joues chauffer et tu te maudis intérieurement tout fixant son t-shirt, silencieuse.